P - 31.400 à 28.600 AEC
Interpléniglaciaire
Froid inter Denekamp / Maisières : 31.400 à 30.500 AEC Interstade de Maisières : 30.500 à 28.600 AEC
MIS 3 (8/9)
CLIMAT
La période couverte par la carte P comprend :
- Le refroidissement inter Denekamp / Maisières qui dura environ 900 ans entre v. 31.400 et 30.500 AEC ;
- Et l’interstade de Maisières – parfois appelé Kesselt ou encore Paudorf – qui pourrait correspondre au GI-5 de la chronologie groenlandaise et qui aurait par conséquent duré de v. 30.500 à 28.600 AEC348. Contrairement à ce qui s’était passé au Denekamp, l’amélioration climatique du Maisières ne fut pas très sensible dans le Nord de l’Europe ; mais elle est cependant repérée par ce que les publications consacrées à l’Europe orientale appellent parfois le ‘’sol de Briansk’’. La Sibérie orientale était recouverte de forêt-steppes au Sud et de toundras parsemées de bosquets au Nord. Cette immense étendue sans connexion avec l’Alaska était peuplée de majestueux mammouths.
En Afrique, l’humide Ndjilien se termina en concordance avec la fin du Maisières.
AFRIQUE
Afrique du Nord
En Afrique du Nord occidentale, l’Atérien semble s’être prolongé pendant les époques de Maisières et de Tursac. Le climat étant plus frais qu’au Denekamp, il est probable que les groupes *Atériens du Sahara furent affectés par un climat devenu plus sec, mais cela n’est que spéculatif.
Afrique Tropicale
Vers 30.000 AEC, des groupes *Proto-Pygmées vivaient déjà au cœur de la forêt pluviale africaine ; ce qui implique qu’ils connaissaient les technologies permettant la survie dans ce milieu naturellement hostile aux Humains. Ces ancêtres des populations Pygmées actuelles, étaient principalement porteurs de l’haplogroupe B2b, mais aussi B1 et A1a.
Afrique du Sud
Situation ethnolinguistique probablement inchangée.
EURASIE
Asie Sud-Orientale (Inde, Indochine, Sunda, Sahul)
Au Maisières, les peuples *Nostratique-2-Orientaux, porteurs des haplogroupes H3 et H1 finirent de s’implanter aux Indes. Avec peut-être une vague H1a et H1b, recouvrant la vague H3 du Denekamp ? Aujourd’hui, les H1a sont encore très bien représentés en Inde avec des fréquences plus élevées dans le Sud, mais globalement assez élevées partout ailleurs (plaine gangétique exclue) ; leur haplogroupe est l’un des principaux observé chez les populations tribales de type Veddhoïde où il a dû remplacer des haplogroupes plus anciens comme F et C. En Inde du nord, le site de Bhimbetka a révèlé les plus anciennes peintures du sous-continent, v. 30.000 AEC. Au Bengale, les outils microlithiques sont mal datés, mais on peut faire l’hypothèse qu’ils apparurent plus tardivement dans cette région que dans le reste de l’Inde [cf. carte Q]. En revanche, l’île de Sri-Lanka fut pénétrée à pieds secs aux alentours de 31.000 AEC par des tribus qui savaient fabriquer des microlames (PSM) et qui fabriquaient par ailleurs des pendentifs servant de parures (sites de Batadomba et de Fa-Hien) ; peut-être les porteurs de ces nouvelles technologies étaient-ils des H3 ?
A Patne, dans le Mahārāshtra, le comportement était moderne (parures) mais le ‘’mode 4’’ se maintint semble-t-il pendant tout le Maisières. S’agissait-il de populations littorales F1 ou F3 qui étaient demeurées non-colonisées par les porteurs du PSM ? Cela parce que la bande littorale de l’Ouest était très forestière, contrairement à la plus grande partie du sous-continent qui était alors couvert d’une grande prairie ?
Le Népal et les autres contreforts de l’Himalaya étaient le conservatoire des vieux peuples, notamment C2a2 et F3 à l’Ouest et DE* à l’Est ; C’était également le cas du Sri-Lanka qui, malgré sa colonisation par un peuple microlithique, conservait toujours des tribus F1 et C*.
Enfin, les peuples *Proto-Papous d’haplogroupes MS, P*, P1* et P2 vivaient peut-être au Bengale oriental, en Assam et en Birmanie ; ils n’avaient probablement pas encore été touchés par les techniques paléolithiques supérieures moyennes (PSM).
En Indochine, les outils constitués de gros éclats détachés d’une matrice (FLK) semblent être devenus fréquents vers 30.000 AEC, mais sans avoir fait disparaitre les anciennes industries ‘’Oldowayennes supérieures’’ (OLD+) qui mêlaient le ‘’mode 1’’ (galets cassés) et une sorte de ‘’mode 2’’ imparfait (galets taillés en biseaux) ; les cartes symbolisent cette innovation sous le nom de ‘’mode 1-2-3’’. Malheureusement, cela ne peut être affirmé qu’avec prudence car l’évolution des industries d’Asie du Sud-Est ne se laisse pas facilement interpréter en raison de l’insuffisance de fouilles, de l’insuffisance des datations absolues et, au-delà de ces considérations techniques, de l’hapax que constitue cette région aux MIS 4, MIS 3 et MIS 2. L’hypothèse génétique et cognitive visant à expliquer ce que nous croyons pouvoir dire de la séquence archéologique d’Asie du Sud-Est a déjà abondamment été détaillée dès l’introduction et sera résumée carte Q. En anticipation, il suffit de dire, ici, que nous interprétons le progrès technologique du Maisières comme une conséquence de l’installation des populations K2a*(O), K2c et K2d, dont les gènes modernes auraient contribué à faire diminuer le taux de gènes pauci-cognitifs de la population locale. En raison de leur position géographique actuelle, il faut inférer une position méridionale de K2c et K2d vis-à-vis de K2a*(O) situé au Nord de l’Indochine. Nous avons vu précédemment que, dans cette région, K2a*(O) avait donné naissance v. 35.000 AEC à l’haplogroupe O, aujourd’hui caractéristique des populations Austriques. Puis que l’haplogroupe O s’était divisé en O1 et O2 (= ex O3)349 v. 33.000 AEC, vraisemblablement en Chine du Sud ? [cf. carte O].
A l’époque de l’interstade de Maisières, v. 31.000 AEC, O2 pourrait avoir migré en Chine Centrale, laissant O1 en Chine du Sud ? S’il eut bien lieu à cette époque, il se pourrait que ce départ de O2 vers le Nord ait contribué à augmenter la proportion d’outils sur petits éclats (S.FLK) en Chine Centrale, phénomène dont il a déjà été dit qu’il ne fit que s’accentuer jusqu’au LGM au détriment des industries sur gros éclats (FLK) [cf. carte O]. A la même époque, v. 31.000 AEC, l’haplogroupe O1 se divisa en ses deux grands variants O1a (= ex O1) et O1b (= ex O2)350 ; le premier allait demeurer en Chine littorale et méridionale, tandis que le second suivrait un jour les traces de O2 [cf. carte Q].
Le Sunda de l’époque demeurait probablement toujours peuplé par des tribus *Proto-Australiennes majoritairement porteuses de l’haplogroupe C1b2. Mais des tribus F2 s’étaient peut-être infiltrées parmi elles, notamment à Sumatra ? Ces populations utilisaient une industrie sur gros éclats (FLK) voire commençaient peut-être à débiter quelques lames ? Fautes de données provenant du littoral et des grandes plaines fluviales du Sunda – aujourd’hui sous les eaux – il est impossible de vérifier cette hypothèse ; mais dans les régions périphériques du Sunda, les sites de Tingkayu (Nord-Est de Bornéo) et de Leang Burung (Sulawesi) ont livré des outils laminaires et des pointes lancéolées en complément de l’habituel matériel archaïque régional composé de pseudo-bifaces et de gros éclats. Les peintures plus anciennes du Sulawesi (site de Maros) [cf. carte O] complète l’allure moderne de la culture locale. Nous avons précédemment proposé d’attribuer ces industries à un *Quasi Paléolithique Supérieur (*QPS) qui serait propre à l’Asie du Sud-Est, au littoral chinois, aux îles du Japon et à l’Australie.
A leur rythme, dans l’isolement d’un Autre-Monde, les peuples *Paléo-Australiens du Sahul poursuivaient leur culture *Quasi Paléolithique Supérieure (*QPS). Sans pour autant contenir des lames, tous les sites que nous croyons pouvoir dater de l’époque de Maisières ont révélé des pigments (ocre) et même parfois des parures en dents perforées (sites de Mandu-Mandu et de Riwi en Australie, et de Buang Merebak en Nouvelle Irlande). Il est difficile d’affilier sans procès ces industries au ‘’mode 4’’ traditionnel d’Eurasie en l’absence d’outils laminaires ; mais ce serait gênant de faire comme si les autres artéfacts modernes n’existaient pas (ocre, parures). Il faut donc se persuader que ces industries exotiques relevaient d’un ‘’moderne autrement’’. Sur les cartes, nous les apparentons cependant à un ‘’mode 3-(4)’’ pour ne pas multiplier les dénominations déjà nombreuses.
Asie Extrême-Orientale (Chine, Corée, Japon, Mandchourie, Mongolie)
Le paysage ethnolinguistique du Denekamp pourrait s’être maintenu en Extrême-Orient pendant l’interstade de Maisières ? Avec les peuples *Déné-Caucasiens Orientaux / *Déné-Ienisseïo-Sinitiques C2b, C2c et C2a que l’on peut respectivement essayer de situer en Mandchourie, en Chine du Nord et en Corée, tandis que des formes racines C2* subsistaient peut-être en Mongolie ; les peuples Aïnous D1b et *Paléo-Tibétains D1a respectivement dans les îles du Japon et dans les montagnes de l’Ouest de la Chine ; les peuples *Paléo-Ryükyüens C1a1 sur le littoral chinois et peut-être coréen ; et les peuples *Proto-Austriques O1 et O2 respectivement en Chine du Sud et peut-être en progression dans l’intérieur de la Chine ? On peut cependant faire l’hypothèse d’un mouvement des *Eurasiatiques orientaux N1* en direction de la Mongolie ? Peut-être en lien avec un mouvement des peuples Q1b1a-L54 ? [cf. ci-dessous].
Considérant que l’haplogroupe O Austrique est le groupe frère de l’haplogroupe N Ouralo-Youkaghire, il est curieux de constater que les langues Austriques d’aujourd’hui ont apparemment perdu tous liens avec le super-groupe Nostratique et avec son sous-ensemble Eurasiatique dont les langues Ouralo-Youkaghire font partie ! Cette situation actuelle est probablement due à l’entrechoquement des langues *Proto-Austriques (initialement membres du super-groupe Nostratique) avec les langues DE*/D, C*/C1 et F2/F4 qui s’étaient successivement empilées avant elles en Asie du Sud-Est ; c’est le millefeuille de créolisations successives dans ce Finis Terrae – et peut-être également les conséquences cognitives des métissages prolongés avec les Dénisoviens – qui rendit les langues Austriques méconnaissables au point de nous les faire apparaître comme appartenant à une famille complètement originale et parfaitement difficile à rattacher aux autres superfamilles de langues351. Cette histoire est donc complètement superposable à celle des langues Aborigènes d’Australie, dont la base Déné-Caucasienne C1 a été effacée pour les mêmes raisons et dans la même région. Et complètement superposable à celle des langues Papouasiennes de Papouasie-Nouvelle-Guinée dont la base eurasiatique K2b a été effacée toujours pour les mêmes raisons et toujours dans la même région très particulière d’Asie du Sud-Est.
Asie Septentrionale (Asie Centrale, Sibérie Occidentale, steppes, Altaï, Baïkalie, Sibérie Orientale)
Il existe une controverse entre les chercheurs qui pensent que des véritables outils microlithiques émergèrent en Sibérie entre v. 35.000 et 30.000 AEC, et ceux qui assimilent les mêmes outils à de simples lamelles (bladlet), c’est-à-dire des lames de taille réduites mais non standardisées pour entrer dans la composition d’outils microlithiques complexes. Ce sont ces derniers que nous suivons en qualifiant ces industries de Paléolithique Supérieur Moyen (PSM) et en repoussant après le LGM l’époque du véritable microlithisme [cf. commentaires de la carte O pour cette question].
En Asie Centrale méridionale et sur le plateau iranien, les *Eurasiatiques occidentaux méridionaux portaient l’haplogroupe P1*(non-Q). A l’époque de Maisières, v. 31.000 AEC, l’haplogroupe R en émergea, probablement sur le plateau iranien. En raison de cette origine très méridionale au sein de l’ensemble Eurasiatique, ce groupe proto R peut dès à présent être appelé *Eurasiatique occidental méridional méridional ; il faut noter qu’il contenait les ancêtres patrilinéaires et linguistiques des Indo-Européens dont la cristallisation ethnolinguistique était encore située dans un lointain avenir [cf. carte Y] ; il contenait également les ancêtres du peuple de Mal’ta, comme nous le verrons bientôt [cf. carte R]. D’autres groupes P1*(non-Q, non-R) – que nous simplifions en P1*(non-R) et que nous écrivons P1*(R) sur les cartes – réalisaient un peuple *Eurasiatique occidental méridional central qui fut peut-être à l’origine de la diffusion du Microlithisme (MIC) dans les steppes asiatiques autour de v. 30.000 AEC ? Le mouvement qui les porta jusqu’aux contreforts de l’Altaï (site d’Ust-Karakol 1)352 pourrait avoir été celui des ancêtres *Proto-Tchouktcho-Nivkhes des Tchouktches et des Nivkhes / Giliak qui expriment encore de nos jours une fréquence élevée de l’haplogroupe P1*(non-R).
Il est possible que ce mouvement septentrional des peuples P1*(non-R) conjugué à l’expansion des peuples Q [cf. ci-dessous], ait contribué à refoulé les populations N2 de Sibérie Occidentale vers l’Europe Orientale, de l’autres côté des monts Oural ? En effet, une composante sibérienne a été proposée à l’origine de la culture de Gorodstov, et un mouvement de N2 pourrait l’expliquer [cf. Europe Orientale ci-dessous]. Rien ne permet de vérifier où d’infirmer cette hypothèse pour l’instant.
Au Nord des peuples *Eurasiatiques occidentaux méridionaux d’haplogroupe P1*(non-Q), vivaient leurs frères d’haplogroupe Q1 que nous avons appelé *Eurasiatiques occidentaux septentrionaux. A l’époque où nous sommes parvenus, ils étaient déjà diversifiés en variants Q1a et Q1b. C’est peut-être v. 31.000 AEC que l’haplogroupe Q1a se divisa en Q1a2-M25 (en position plutôt occidentale depuis laquelle il aurait pu contribuer au départ de N2 en Europe Orientale ?) et Q1a1-F746/NWT01 (au Nord de l’Altaï ?). Concernant Q1b, le scénario que nous proposons est le suivant : les haplogroupes Q1b2-B28 et Q1b1-L53 pourraient s’être détaché de Q1b vers 31.000 AEC, peut-être dans la région des steppes du Chulym ou de l’Angara ? Puis, l’apparition du variant Q1b1a-L54 v. 29.000 AEC pourrait s’expliquer par la migration fondatrice de ses porteurs en direction de l’Est où ils auraient pu remplacer les *Eurasiatiques orientaux d’haplogroupe N1 dans les steppes de l’Angara et en Cis-Baïkalie ? Cette fraction Q1b1a-L54 constituait – entre autres – l’amorce d’un peuple *Proto-Amérinde : en effet, au Tursac, nous verrons une partie de ce peuple descendre la Lena en direction du Grand-Nord et devenir les ancêtres directs des premiers Humains appelés à coloniser les deux Amériques [cf. carte Q] ; notons bien que l’amorce de ce mouvement *Proto-Amérinde doit nécessairement être placé avant l’apparition d’un véritable microlithisme Yubetsu dans la région (et donc avant le LGM), puisque les Amérindes de type Pré-Clovis (Pré-Bölling et Bölling) et Clovis (Alleröd) utiliseront toujours une technologie PSM proche du complexe Nenana de leurs frères demeurés au Nord [cf. cartes W & X].
Tandis que les Q1b1a-L54 peuplaient les steppes de l’Angara et la Cis-Baïkalie, il est probable que d’autres Q1b1* – pour nous fantômes – demeurèrent dans les vallées de la Toungouska-Pierreuse et de la Toungouska-Inférieure où l’on a trouvé des vestiges Humains modernes présentant des traits archaïques (site de Pokrovka-2).
Les variants Q1(non-Q1b1) de l’haplogroupe Q demeurèrent à l’Ouest, en Sibérie Occidentale et en Asie Centrale : depuis cette position, l’haplogroupes Q1b2-B28 aura un destin moyen-oriental, indien et européen (emporté par les migrations des peuples steppiques récents ?) ; tandis que Q1a-M25 liera probablement assez tôt son destin à celui du futur *Peuple R1a du Nord [cf. cartes T & suivantes] lequel – après avoir intégré le creuset où cristalliseront les Indo-Européens – se répandra à faible taux entre l’Irlande et l’Inde. Seul de tous les héritiers de Q1, le variant Q1a1-F746/NWT01 aura une histoire bien identifiée, puisque nous le retrouverons chez le peuple d’Afontova-Gora [cf. carte U] et chez les Eskaléoutes [cf. carte Q & suivantes].
Resté en arrière sur le plateau iranien, l’haplogroupe ‘’mineur’’ Q2 [cf. carte O] se sépara peut-être v. 31.000 AEC en ses variants Q2a-F1213 et Q2b-L68.2/Y1143. Leur histoire restera essentiellement méridionale. Ainsi, le variant Q2a se retrouvera un jour au Proche-Orient et en Afrique du Nord ; pourtant, certaines branches de Q2a existent aussi en Inde et en Chine où elles ont peut-être été implantées par les mouvements historiques sémitiques, hellénistiques et nestoriens ? Le variant Q2b aura quant à lui une répartition qui pourrait s’expliquer par des mouvements steppiques tardifs, peut-être ceux des Turcs ou des Mongols ? Nous continuerons à faire figurer ces haplogroupes mineurs sur les cartes suivantes, mais sans détailler leurs mouvements.
Notons cependant une observation : N2, Q2 et R2 apparaissent comme des perdants comparativement à leurs groupes frères N1, Q1 et R1 qui sont trois grands haplogroupes nordiques dont la réussite fut des plus considérable. Ce contraste s’explique tout simplement parce que N2, Q2 et R2 sont longtemps restés en arrière, tandis que N1, Q1 et R1 prospérèrent successivement dans le système des steppes asiatiques. Ceux-là furent-ils plus aventureux que les autres ? Ou eurent-ils tout d’abord le malheur d’être expulsés par les autres avant de parvenir à tirer profit de leur exil ?
A l’époque de Maisières et de Tursac – c’est-à-dire au total entre v. 31.000 et 24.000 AEC – nous connaissons ou croyons connaitre des sites d’habitat sur la rivière Aldan, principal affluent de la Moyenne-Lena (Ust’Mil 2b, Ikhine 2). En effet, la datation de ces sites – que certains chercheurs attribuent à une phase ancienne de la culture Dyuktai (fermement attestée en post-LGM) – est fortement contestée, comme est contestée leur appartenance à cette culture. Lorsque ces sites controversés sont mis à l’écart, il ne reste plus qu’une probable culture PSM bien en phase avec son temps. Qui étaient ces gens ? S’agissait-il d’*Eurasiatiques Orientaux N1* dont la lignée patrilinéaire serait aujourd’hui éteinte ? Au Nord de la Sibérie Orientale, le site de Yana Rhinoceros Horn contenait une industrie PSM qui pourrait être attribuée à un groupe de ce peuple fantôme qui aurait descendu la Lena, comme cela se passa probablement au cours de chaque épisode tempéré ?
Dans le Grand-Nord, les N1* pourraient avoir rejoint le peuple C*(non-C2) dont nous avons postulé la migration au cours du Denekamp [cf. carte O] ? Quoi qu’il en soit, les régions les plus septentrionales de la Sibérie Orientale demeurèrent peuplées au cours de l’interstade de Maisières. Dans ce contexte, les sites de Duvanny et de Vrangel pourraient-ils être attribués à ces hypothétiques C* ? Le matériel archéologique est malheureusement pauvre, avec des outils constitués de gros éclats (FLK) mais associés à des outils en os pouvant réaliser une industrie PSI ?
Les derniers Néandertaliens asiatiques vivaient encore dans l’Altaï353 et peut-être aussi dans des montagnes de Sibérie Orientale ; région où ils ne sont toutefois pas attestés ? A cette époque, ces vestiges d’un autre temps devaient être déjà affectés par le flux génique en provenance des Hommes modernes de la région ? Dans ce cas, ils pourraient avoir formé des ‘’industries de transition’’ de même type que celles qui existèrent en Europe. La carte P est la dernière sur laquelle nous faisons figurer des Néandertaliens. Il se pourrait toutefois que, jusqu’au LGM, des Néandertaliens ou des Quasi-Néandertaliens aient survécus dans les piedmonts des massifs montagneux. Ils en seront délogés par le grand froid [cf. cartes R & S]. Ensuite, ils ne survivront plus que sous forme d’ADN incorporé au génome des Hommes modernes ; ADN dont le taux diminuera régulièrement sur le long terme en raison de la pression de sélection.
Asie Occidentale (Moyen-Orient, Proche-Orient, Anatolie, Arabie)
Les tribus *Nostratiques-2-Orientales demeurées en arrière de l’expansion indienne du groupe H, portaient les haplogroupes H3 et H2 ; ce dernier étant vraisemblablement installé sur le plateau iranien. D’autres tribus H3 vivaient peut-être en Oman et aux Emirats, de l’autre côté du Golfe Persique, où elles pourraient avoir été ancestrales de la population Sumérienne, puisque – beaucoup plus tard – celle-ci sera originaire de ces régions [cf. atlas n°4] ? Mais faute de données archéogénétiques sur les anciens Sumériens, il est impossible de confirmer ou d’infirmer cette hypothèse ; nous nous contenterons de faire remarquer que certains linguistes ont situé la langue sumérienne soit à l’intérieur de la famille nostratique (certains lui trouvant même des points communs avec l’Indo-Européen), soit comme groupe frère du nostratique, soit comme détaché entre le nostratique et le déné-caucasien (ce qui est une autre façon d’exprimer la même chose puisqu’il ne s’agit que de seuils). En lisant cet atlas, on se rend compte que le concept de langue nostratique est élastique selon les ingrédients dont on veut bien le constituer ; raison pour laquelle nous le déclinons en nostratique-1 -2 et -3 sur une base chronologique. Au plus large, le nostratique fut la langue du ‘’hub’’ moyen-oriental postérieurement au détachement du déné-caucasien ; avec cette définition, le sumérien doit nécessairement faire partie des langues nostratiques. Bien entendu, l’haplogroupe H3 n’est pas le seul candidat support possible. Les données archéogénétiques font cruellement défaut.
En Perside / Fars et dans les Zagros du groupe *Nostratiques-2-Central, l’haplogroupe K1 pourrait avoir donné naissances vers 31.000 AEC à ses variants racines L et T, suffisamment important l’un et l’autre pour avoir bénéficié chacun d’une lettre bien à eux lorsque les haplogroupes ADN-Y furent découverts et commencèrent à être classés.
Au Nord des K1(= LT), les populations *Nostratiques-2-Septentrionales portaient l’haplogroupe G* qui n’avait pas encore donné naissance aux variants G1 et G2.
Enfin, l’ancien groupe *Nostratique-2-Occidental, porté par l’haplogroupe IJ, avait déjà éclaté du fait de l’apparition des variants I et J, et de la dispersion de ceux-ci. Ainsi, les tribus d’haplogroupe I s’installèrent en Anatolie où apparurent les variants I*, I1 et I2 en prélude à un mouvement qui conduisit certains de leurs porteurs à pénétrer en Europe v. 31.000 AEC. Cette quatrième colonisation de l’Europe par un peuple moderne doit être positionnée à la racine du peuple *Gravettien dont la cristallisation ethnolinguistique s’achèvera au contact des indigènes Aurignaciens d’Europe [cf. ci-dessous]. Ce schéma est exactement superposable avec ce qui s’était déjà produit lorsque les *Paléo-Levantins / *Bachokiriens, les *Proto-Aurignaciens et les *Aurignaciens avaient colonisé l’Europe en leurs temps [cf. cartes M & N]. Quant aux peuples J, nous avons postulé qu’ils s’étaient établis v. 33.000 AEC en Haute-Mésopotamie et au Nord-Levant où ils avaient établi l’Antélien (ANT) (v. 33.000 à 19.000 AEC), phase culturelle PSM qui succéda à l’Aurignacien du Levant [cf. carte O]. Au Maisières, l’Antélien s’installa également au Sud-Levant, ne laissant plus que l’Afrique du Nord orientale aux *Aurignaciens Méridionaux Dabbéens (DAB).
En Anatolie, les porteurs de l’haplogroupe I ne firent pas disparaitre l’haplogroupe aurignacien C1a2 qui restera présent jusqu’au Néolithique à l’intérieur de la péninsule. Peut-être les nouveaux-venus I longèrent-ils principalement les côtes Sud et Nord ? La même question pourra se poser de nouveau lors de l’arrivée des haplogroupes post LGM [cf. cartes R & suivantes]. Remarquons que la survivance temporaire de C1a2 au cœur de l’Anatolie fut strictement parallèle à celle que nous constaterons en Espagne Centrale, jusqu’au seuil du Néolithique [cf. carte Q & suivantes].
Le départ d’une partie des peuples H vers l’Est, des peuples P1*(R) sur le plateau iranien, des peuples P1*(non-R) en Asie Centrale, et des peuples I vers l’Ouest anatolien et européen, laissa comme toujours des sédentaires en arrière, au cœur du vieux ‘’hub’’ ancestral où à sa proximité immédiate : il s’agissait des peuples J en Haute-Mésopotamie et au Levant, et des peuples G*, L et T dans les Zagros, et des peuples H2 et H3 sur le plateau iranien et en Iran oriental. Les langues de tous ces peuples restés proche- et moyen-orientaux constituaient ensemble le *Nostratique dans un état chronologique de la ‘’langue centrale’’ que nous nommerons désormais *Nostratique-3 ou *Nostratique-Classique à partir de la carte suivante [cf. carte Q]. Evoluant sur un mode ‘’tranquille’’, cette ‘’langue centrale’’ du vieux ‘’hub’’ était stabilisée par le regroupement géographique de ses locuteurs, qui étaient par ailleurs tous de proches cousins. Concrètement, le *nostratique-3 regroupe l’afrasien, le kartvélien, l’élamite et le dravidien ; notons que nous n’incluons pas l’eurasiatique (+ amérinde) à ce groupe, car nous le considérons comme le surgeon d’une phase plus ancienne du nostratique. Nous voyons néanmoins qu’au sein de l’eurasiatique de l’époque de Maisières, les ancêtres R des futurs Proto-Indo-Européens, étaient les Eurasiatiques les plus proches du groupe Nostratique-3 ; ce qui aide à comprendre les rapports maintes fois soulignés entre l’indo-européen et des langues comme le kartvélien et l’afrasien.
Europe Centrale et Occidentale
Nous avons précédemment affilié le groupe ethnolinguistique *Aurignacien à la superfamille Déné-Caucasienne, et nous l’avons associé à l’haplogroupe C1a2. Au début de l’interstade de Maisières, la culture aurignacienne (AUR) – portée par le peuple *Aurignacien – était répandue dans toute l’Europe Centrale et Occidentale. Toutefois, l’intrusion de nouveaux peuples proche-orientaux – qui allaient être le ferment de la cristallisation *Gravettienne [cf. ci-dessous] – commença à marginaliser l’Aurignacien dès v. 31.000 AEC. Sur le plan génétique, nous pouvons visualiser, aujourd’hui, que l’arrivée des *Gravettiens a dispersé dans toute l’Europe les gènes nucléaires de l’ancienne population *Aurignacienne. Des groupes *Aurignaciens se maintinrent cependant en Europe Centrale tout au long du Maisières, aux côtés – ou plus probablement en marge – des *Gravettiens anciens. Dans le même temps, d’autres groupes *Aurignaciens se replièrent d’une part au Sud, sur les plateaux de Bosnie et de Mésie, ainsi peut-être qu’en Grèce ; et d’autre part à l’Est, dans les Carpates et sur les plateaux trans-carpatiques (Galicie, Podolie, Moldavie, Bessarabie). Ce processus fut probablement progressif, avec tout d’abord une installation *Aurignacienne dans les Carpates, entre v. 31.000 et 30.000 AEC, qui entraina la disparition du Szélétien354 ; puis, cela étant fait, une installation de l’autre côté des cols des Carpates, sur les plateaux et en Moldavie entre v. 30.000 et 28.000 AEC. Dans ces régions, les vestiges aurignaciens connus sont à la fois en plus petit nombre et plus récents que ceux d’Europe Centrale.
En Europe Occidentale, les *Aurignaciens continuèrent à peupler la France, la Suisse, une partie de l’Allemagne et le Sud de la Grande-Bretagne pendant toute la durée de l’interstade de Maisières. L’Aurignacien de Grande-Bretagne est mal connu ; il était certainement très interpénétré avec les cultures foliacées du Nord de l’Europe et devait avoir intégré les vieux haplogroupes indigènes.
Enfin, c’est peut-être lors de l’épisode froid qui sépara le Denekamp du Maisières v. 31.000 AEC, ou au début de l’interstade de Maisières v. 30.000 AEC, que la ‘’frontière de l’Ebre’’ céda sous la pression d’envahisseurs *Aurignaciens qui apportèrent C1a2 sur la péninsule355. Les derniers Néandertaliens du Sud de l’Espagne – qui étaient également les derniers d’Europe – disparurent très rapidement v. 30.000 AEC356. Comme partout ailleurs au cours de l’aventure humaine, cette disparition fut le produit de l’action conjuguée de génocides tribaux, de marginalisation des rescapés dans des zones de moins en moins propices à la survie, et de la dilution de l’ADN des survivants dans le stock génétique des envahisseurs modernes ...
Hormis le cas particulier de la péninsule ibérique, c’est dans le Nord de l’Europe que le taux des gènes Néandertaliens demeurait probablement le plus important, au sein des cultures de transitions septentrionales regroupées sous le nom de complexe Lincombien-Ranisien-Jerzmanowicien (LRJ). Ces peuples fabriquaient des pointes foliacées, héritières des pointes foliacées moustériennes récentes [cf. carte M]. Outre leur ascendance néandertalienne certainement importante, les peuples LRJ descendaient aussi – et probablement surtout – des premiers colons modernes de l’Europe que nous avons appelé *Bachokiriens [cf. carte M] et auxquels nous avons attribué une ascendance *Paléo-Levantine [cf. cartes A à L]. Cette filiation remontant in fine aux ‘’Proto-Cro-Magnons’’ du Levant [cf. atlas n° 2] pourrait expliquer les rares individus contemporains A1a* et A1b-M13 observés aux îles Britanniques et pourrait faire d’eux des descendants patrilinéaires du peuple *Lincombien357. Vers 30.000 AEC, peut-être sous la pression combinée d’un flux génique venu du Sud Aurignacien et de la sélection qui s’exerçait contre les gènes pauci-cognitifs, le complexe LRJ évolua en une forme récente des industries à pointes foliacées. Ces populations *Foliacées récentes – que nous devons désormais considérer comme pleinement modernes –, exprimaient peut-être un taux de gènes Néandertaliens moins élevé que celui de leurs ancêtres LRJ pour les raisons qui viennent d’être dites ; mais ce taux restait probablement plus élevé que celui des peuples du Sud, péninsule ibérique exceptée ?
Nous avons vu que l’haplogroupe I pourrait avoir donné naissance à ses grands variants I1, I2 et I* aux alentours de 31.000 AEC, quelque part en Anatolie Orientale ou en Arménie [cf. ci-dessus]. Les préhistoriens ont beaucoup débattu l’origine du Gravettien (GRA), lui donnant alternativement une provenance extra-européenne, ou le faisant naitre d’une évolution interne à l’Aurignacien d’Europe Centrale ? Cette dernière hypothèse n’exclut d’ailleurs pas la première puisque lorsqu’un peuple envahisseur se superpose à un peuple indigène, ce dernier lui lègue toujours quelque chose de son ancienne culture et de son ancienne langue ; et quelque chose de ses gènes nucléaires et de ses haplogroupes ADN-mt. Si l’on veut bien essayer d’associer le Gravettien avec l’haplogroupe I – l’archéogénétique commence à nous y inciter – un ferment *Proto-Gravettien est nécessairement venu d’Anatolie où se trouvent encore les formes racines de I* ; hormis ce fait génétique, l’intrusion d’un nouveau peuple animé d’une force colonisatrice multidirectionnelle est la seule façon rationnelle d’expliquer pourquoi les vestiges gravettiens anciens de Pagliacci (Italie, où l’on a découvert un individu I*) et de Kostenki-8 Telmanskaia (Russie) sont très semblables, alors que ces deux sites contemporains (entre v. 30.000 et 28.000 AEC) sont distants de près de 2000 km à vol d’oiseau et de beaucoup plus par la route ! Une telle homogénéité culturelle à une telle distance ne peut s’expliquer que par le commun héritage d’ancêtres proches dont les enfants se seraient séparés dans les Balkans ! Le plus probable est donc que les *Proto-Gravettiens sont entrés en Europe par le Bosphore v. 31.000 AEC, pendant la période froide qui sépara le Denekamp du Maisières, et que le peuple *Gravettien a rapidement cristallisé sur place aux contacts des *Aurignaciens des Balkans, avant de se mettre à arpenter dès v. 30.000 AEC les trois routes européennes possibles : la voie de l’Europe Centrale danubienne, la voie de l’Europe Occidentale méditerranéenne et la voie l’Europe Orientale pontique. Pourquoi cette rapidité ? L’arsenal technologique et guerrier des *Gravettiens pourrait avoir été plus moderne que celui des *Aurignaciens. Si ces derniers avaient autrefois colonisés l’Europe néandertalienne à la pointe de leurs sagaies [cf. carte N], les *Gravettiens l’emportèrent peut-être sur leurs devanciers grâce à la technologie du propulseur qui rendait leurs bras plus forts pour envoyer des traits plus puissants à plus longue distance ?
Est-il possible d’aller plus loin dans la spéculation ? Nous postulons que v. 31.000 AEC, ce sont I* et I1 qui entrèrent les premiers en Europe, où ils portèrent le Gravettien ancien (GRA ANC) qui était la forme européenne du Paléolithique Supérieur Moyen (PSM) ? En effet, les variants I*, encore présents à des taux faibles en Anatolie et en Irak, se retrouvent aujourd’hui au Nord-Caucase, en Laponie, en France et en Andalousie, c’est-à-dire au bout du bout des trois routes européennes susmentionnées, dans ce qu’il faut comprendre comme ayant été les 3 Finis Terrae où de nouveaux envahisseurs les auraient repoussés. L’haplogroupe I1 est rare en Anatolie et en Europe Occidentale, mais fréquent en Europe du Nord où il atteint 45% en Scandinavie méridionale. Sa faible représentation en Europe Occidentale pourrait découler du fait que lorsqu’il s’implanta en Europe Centrale, les pays d’Europe Occidentale étaient encore peuplés par les *Aurignaciens ? Quant aux taux scandinaves élevés, ils sont probablement dus au reflux vers le Nord des populations post-magdaléniennes au cours du Tardiglaciaire et au début de l’Holocène [cf. cartes W à Z & atlas n°4].
Enfin, l’haplogroupe I2 comprend une forme souche I2* cantonnée aux lieux d’origine de I (Arménie, Géorgie, Anatolie), et plusieurs variants I2a, I2b et I2c qui pourraient avoir découlé d’un seul rameau de I2* entré en Europe au début du LGM, v. 28.000 AEC ? [cf. carte Q]. Au travers de ses divers variants – dont I2a est de loin le plus abondant –, cet haplogroupe I2 pourraient avoir porté le Gravettien récent sur tout le continent, et avoir repoussé non seulement C1a2 mais aussi I* et I1 ? [cf. carte Q].
Certains chercheurs classent le Gravettien parmi les industries microlithiques, tandis que d’autres parlent plutôt de lamelles pour désigner les petites pièces. Pourtant, d’authentiques microlithes semblent avoir existé, y compris géométriques, bien que ces pièces n’étaient pas abondantes. Nous apparentons cependant le Gravettien au *Microlithisme-ancien de type Paléolithique Supérieur Moyen (PSM) qui se répandit en Sibérie en même temps qu’il se répandait en Europe.
Europe Orientale
La culture aurignacienne d’Ukraine et la culture de Kostenki-Streletskaya / Streletskaya (intriquée d’éléments aurignaciens) de la plaine russe, furent suivies d’un hiatus qu’il faut peut-être faire coïncider avec la période froide inter-Denekamp-Maisières, entre 31.400 et 30.500 ACE358 ?
A son issue, v. 30.000 AEC, la culture aurignacienne des steppes pontiques fut remplacée par la branche orientale du Gravettien ancien qui pourrait avoir apporté l’haplogroupe I* dans la région ? Le site de Kostenki-17sup a livré des microlames et des pendentifs
Dans le même temps, la culture de Kostenki-Streletskaya fut remplacée par la culture de Kostenki-Gorodstov / Gorodstov (K-GOR) qui commença v. 31.000 AEC et qui dura probablement jusque v. 24.000 AEC, c’est-à-dire qui s’étendit sur les interstades de Maisières et de Tursac. Environ un tiers des outils de la culture de Gorodstov relevait d’un héritage moustérien, ce qui pourrait nous inciter à l’inclure dans les cultures de transition, que nous avons montré portées par des peuplades hybrides. Toutefois, des éléments de parure et les aiguilles retrouvées à Kostenki-15-Gorodstov et à Kostenki-14-Markina Gora c2, classent sans ambiguïté la culture de Gorodstov dans le véritable Paléolithique supérieur de ‘’mode 4’’. Une participation sibérienne a également été proposée à l’origine de cette culture359 ; composante sibérienne occidentale qui pourrait également être à l’origine des sites de l’Oural méridional (Oufa et Kapova) où des peintures probablement bien plus récentes mais mal datées ont été trouvées ? Ces Sibériens étaient-ils des N2 que nous pourrions appeler *Para-Eurasiatiques-Orientaux ? Cet haplogroupe aurait pu être répandu en Sibérie Occidentale à la fin du MIS 3 ? L’hypothèse découle de l’observation que N2 survit toujours en Europe actuelle ; mais la route et la date d’entrée de ses porteurs peuvent laisser la place à de nombreuses hypothèses. Au total, en dépit des probables apports extérieurs que nous venons de mentionner, nous proposons de conserver au peuple gorodstovien le nom ethnique de *Kostenkiens.
Plus loin au Nord, le site de Sungir / Soungir date du ‘’sol de Bryansk’’ et donc date également de l’interstade de Maisières. Davantage encore que sa variante méridionale de Gorodstov, cette culture de Sungir a suscité beaucoup d’interrogations en raison de son appartenance certaine à l’horizon technologique du Paléolithique Supérieur dans un contexte industriel qui n’est pas sans lien avec la culture de Streletskaya mais qui comprend également des outils moustériens accompagnés de pointes foliacées ; raison pour laquelle le Sungirien est indiqué par l’inscription FOL-SUN sur la carte. Une fois de plus, l’explication la plus simple est que cette juxtaposition hétérogène témoigne d’une origine hybride, à la fois indigène et intrusive, du peuple *Sungirien. On peut aller un peu plus loin dans l’interprétation et avancer que, lors du refroidissement inter Denekamp-Maisières, des Quasi-Néandertaliens demeurés moustériens au Nord de l’Europe Orientale, descendirent vers le Sud et se mêlèrent aux gens de Streletskaya (qui étaient eux-mêmes descendants des *Kostenkiens de Spitzine et des *Aurignaciens qui les avaient infiltrés) ? Lorsque le climat redevint plus clément, les tribus issues de cette promiscuité pourraient avoir été à l’origine du Sungirien et dans une moindre mesure du Gorodstovien en fonction d’un gradient décroissant d’apports foliacés ? Deux cultures dont il est nécessaire de souligner qu’elles étaient bien différentes du Gravettien et de l’Aurignacien qui prévalaient dans l’Ouest. Cependant, l’archéogénétique a montré que 4 individus retrouvés à Sungir portaient l’haplogroupe C1a2 que nous avons associé aux *Aurignaciens. Cela pourrait signifier que la culture de Streletskaya avait elle aussi été à base C1a2 ; et que les éléments aurignaciens intrusifs qui s’étaient mêlés aux éléments Spitzine indigènes, avaient été déterminants à son origine360.
Notes :
(348) Les dates données ici sont vraies à condition de valider l’équation « Maisières = GI-5.2 + GI-5.1. Mais on pourrait tout aussi bien identifier le Maisières au seul GI-5.2 et ainsi situer sa fin v. 30.000 AEC ; au moment où commence d’ailleurs le GS-5. Dans cette version alternative, le bref réchauffement GI-5.1 – qui entrecoupa le GS-5 entre v. 28.800 et 28.600 AEC – devrait être considéré comme un simple épisode séparant le stade « *Inter Maisières / Tursac » en une partie ancienne et une partie récente. Avec cet exemple, on comprend qu’à défaut d’un arbitraire, il est difficile de définir des consensus en dépit de données solides. De belles journées ensoleillées peuvent bien ponctuer nos hivers !Retour
(349) Nous rappelons que nous utilisons la nomenclature actualisée ISOGG 2018. Il est conseillé de faire très attention à l’évolution de la nomenclature lorsque l’on se réfère à des publications scientifiques, même récentes.Retour
(350) Une fois de plus, la plus grande attention doit être portée à l’évolution de la nomenclature des haplogroupes ADN-Y.Retour
(351) Les langues *Para-Austriques du Sud se dilueront plus tard dans les langues Austriques qui les recouvreront. Leur rameau le plus septentrional – à l’origine patrilinéaire des Ouraliens et des Youkaghirs – sera quant à lui remplacé par une langue Eurasiatique.Retour
(352) Certains chercheurs datent les microlithes de ce site vers 36.000 AEC. Mais la date de v. 31.000 AEC est plus vraisemblable si l’on considère les autres contraintes de la documentation.Retour
(353) Site moustérien tardif d’Ust‘Kanskaya (Altaï), entre v. 38.000 et 28.000 AEC.Retour
(354) On voit bien que chaque peuple indigène que des envahisseurs obligent à se réfugier en des lieux peu attractifs, désintègre et intègre les réfugiés de l’époque précédente, à qui ses propres ancêtres avaient autrefois réservé le même sort. Impitoyable mécanisme qui broie et qui recycle les peuples ! Notons qu’en amont de la séquence, c’est de cette manière que durent se constituer des peuples Quasi-Néandertaliens sur les hauteurs.Retour
(355) L’haplogroupe C1a2 se maintint en Espagne au moins jusqu’au Mésolithique. Cette longue persistance avérée de C1a2 (associées aux langues Déné-Caucasiennes) en Espagne du Nord, non loin du pays Basque (langue Déné-Caucasienne) est un élément important pour expliquer la genèse de la langue Basque actuelle [cf. atlas n°4].Retour
(356) Dans cette région, le remplacement de population donne en effet l’apparence de la soudaineté.Retour
(357) Pourquoi ces haplogroupes sont-ils arrivés jusqu’à nous chez les descendants des *Lincombiens de Grande-Bretagne et pas chez ceux des *Ranisiens d’Allemagne ni chez ceux des *Jerzmanowiciens de Pologne ? Parce que la Grande-Bretagne est devenue une île et que les anciens haplogroupes ont TOUJOURS tendance à se maintenir plus longtemps dans les îles et dans les montagnes, moins exposées à la balayette ethnique que les plaines continentales. C’est pour cette raison qu’il reste aussi des A1b-M13 en Sardaigne.Retour
(358) Nous suivons la nouvelle chronologie des cultures paléolithiques de la plaine russe.Retour
(359) Par Sibérien, il faut comprendre ‘’Eurasiatique’’. La culture Sibérienne sera en effet nécessairement porté par ce grand groupe ethnolinguistique dans ce que nous avons appelé le ‘’hub’’ secondaire des steppes asiatiques. Sur le plan des haplogroupes, elle sera donc nécessairement portée par N1, P1, Q1 et R. Raison pour laquelle il n’y aurait rien d’étonnant que des variants frères demeurés en Sibérie Occidentale aient porté une culture voisine.Retour
(360) Cette hypothèse se traduit concrètement ainsi : 1) Dans un premier temps, des C1a2 *Aurignaciens se seraient imposés dans l’Est aux C1b* de Spitzine ; 2) Dans un second temps, au cours du hiatus apparent de l’époque inter-Denekamp-Maisières, des Quasi-Néandertaliens foliacés seraient descendus du Nord, mais sans prendre le dessus sur les indigènes ; 3) les conditions interstadiales étant revenues, les populations désormais métissées – mais toujours descendantes des premiers envahisseurs *Aurignaciens en lignée paternelle – auraient développé une forme hybride de l’ancienne culture de Streletskaya, que nous appelons culture de Sungir.Retour