top of page

N - 41.300 à 36.200 AEC

Interpléniglaciaire

Interstade d’Hengelo : 41.300 à 37.900 AEC

Stade d’Huneborg : 37.900 à 36.200 AEC

MIS 3 (6/9)

 

 

CLIMAT

 

D’une durée totale d’environ 3400 ans, l’interstade d’Hengelo fut la plus belle période de l’interpléniglaciaire (MIS 3). Bien que moins chaude que notre interglaciaire Holocène, cette époque fut suffisamment clémente pour encourager une importante accentuation du peuplement moderne dans les régions eurasiennes de moyenne latitude. Parallèlement, le Paléolithique Supérieur s’étendit sur presque toute la surface du vieux Monde.

Comme la plupart des périodes identifiées par l’étude des sédiments, l’interstade d’Hengelo regroupa plusieurs GI (Groenland Interstadial) et GS (Groenland Stadial). Entre v. 41.300 à 40.200 AEC, le GI-11 constitua un interstade d’Hengelo ancien. Il fut suivi d’un refroidissement entre 40.200 et 39.500 AEC (GS-11). Puis le GI-10 coïncida avec ce qu’on pourrait appeler interstade d’Hengelo moyen, entre v. 39.500 et 38.800 AEC. Après un nouveau refroidissement interne (GS-10) survenu entre v. 38.800 et 38.200 AEC, l’interstade d’Hengelo récent (GI-9) fut un bref réchauffement qui dura trois siècles seulement, entre v. 38.200 à 37.900 AEC. Au cours de l’Hengelo, on peut avancer un niveau moyen des océans proche de – 25 mètres, ce qui fait que la Béringie était de nouveau recouverte par les eaux286. Au Nord-Ouest de l’Europe se trouvait une prairie froide parsemée de bouleaux. Le reste du continent était de nouveau couvert de forêts entrecoupées d’espaces dégagés.

En Afrique, la ceinture de désert cessa d’être hyperaride comme elle l’avait été depuis le début du premier pléniglaciaire ; cette phase relativement humide – qui succéda à la très longue phase sèche du Maluekien – est connue sous le nom d’humide Ndjilien ; de ce fait, la vallée du Nil pourrait être redevenue perméable pour un temps ? Comme on le voit sur la carte N, nous faisons toutefois l’hypothèse que la vallée ne retrouva pas significativement son rôle de grand boulevard faunique et ne permit pas de grands mouvements humains. Cette embellie climatique africaine semble s’être étendue de v. 40.000 à 30.000 AEC ; mais il est vraisemblable qu’elle se décomposa en une série d’oscillations humides entrecoupées d’oscillations sèches dont le détail ne nous est pas accessible.

A la suite de l’interstade d’Hengelo, le stade d’Huneborg (GS-9) consista en un retour des conditions glaciaires pendant environ 1700 ans, entre v. 37.900 à v. 36.200 AEC. Ce changement climatique pourrait avoir été lié à l’éruption massive des Champs Phlégréens (Italie) qui survint précisément au début du stade d’Huneborg ? Le niveau des océans baissa alors jusque vers la cote – 50 mètres.

 

Les commentaires de la carte N sont les derniers à être organisés haplogroupes par haplogroupes ; ils sont l’occasion de refaire un point complet sur le paysage mondial des haplogroupes ADN-Y à cette époque charnière qui fut l’un des plus grands temps forts de l’histoire de l’Humanité. A partir de la carte O, en raison d’une densification et d’une complexification croissante du peuplement de la Terre, nous adopterons une logique géographique.

 

 

AFRIQUE

 

Nous avons répété qu’en Afrique, l’évolution entre le Paléolithique moyen (MSA) et le Paléolithique supérieur (LSA) fut insensiblement graduelle, au moins depuis le MIS 7 [cf. atlas n°2]. A partir de l’Hengelo, les industries d’Afrique de l’Est et d’Afrique du Sud, peuvent désormais être considérées comme appartenant structurellement à un LSA constitué, bien que certains auteurs parlent encore de transition MSA-LSA ou bien de LSA ancien. On y trouve des microlithes en grand nombre, de l’ocre, des pendentifs, etc… Les industries d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique du Nord devaient cependant rester attachées à un MSA plus ancien.

 

Peuples africains d’haplogroupes A et B

 

Les peuples *Lupembiens porteurs des vieux haplogroupes éémiens devaient encore résider dans l’Ouest de la bande sahélienne où ils maintenaient une industrie MSA Lupembienne qui était moins évoluée que les industries LSA d’Afrique du Sud et de l’Est. Actuellement, c’est en Afrique de l’Ouest et dans les îles du Cap Vert – où ils se sont réfugiés – que l’on trouve encore les traces d’A00 et d’A0, les haplogroupes racines de l’Humanité. Leurs porteurs cohabitaient avec des individus A1a, B1 et B2a ; ces derniers vivant peut-être dans la région du lac Tchad ? Aux côtés de B2, B1 reste encore assez fréquent de nos jours en Afrique de l’Ouest où il complète le vieux fond véritablement indigène de la population287; celui qui résistera à la colonisation de la région par les ancêtres des peuples porteurs de l’haplogroupe E [cf. cartes W & suivantes].

 

Sans certitude, nous avons fait commencer au Moershoofd le peuplement de l’orée de la grande forêt pluviale par les ancêtres essentiellement B2b des Pygmées [cf. carte L]. Mais c’est de l’époque d’Hengelo que nous proposons de dater l’occupation de la forêt pluviale dense par ces populations, peut-être ‘’aidées’’ en cela par une pression débutante des peuples d’haplogroupe E qui auraient commencé à amorcer un timide mouvement dans l’Est de la bande sahélienne [cf. ci-dessous] ? Dans cette hypothèse, la forêt tropicale aurait pu constituer un refuge comparable aux refuges plus classiques que constituent les montagnes et les îles288 ? Ces tribus B2b de la forêt étaient les ancêtres des Pygmées Aka / Baka et Mbuti dont les populations ne se sépareraient pas avant la fragmentation de la grande forêt au MIS 2. Les Mbuti actuels sont B2b1b2 mais intègrent également des éléments B2a ; en revanche, les Aka / Baka sont homogènement B2b1a289. Nous avons vu que les Pygmées Gyele du Sud Cameroun ont plutôt quant à eux des racines A1a. Tous ces Pygmées ancestraux devaient encore parler des langues à clics issues du même groupe que celles des Hadza et des Sandawe290 actuels, eux aussi porteurs de l’haplogroupe B2b. Ces populations disposaient d’une industrie LSA dont certains microlithes étaient peut-être déjà des pointes de flèches ou à tout le moins des pointes de sagaies qui auraient pu être lancées par d’hypothétiques propulseurs non retrouvés ?

 

En Afrique du Nord, l’Atérien était répandu depuis la Cyrénaïque jusqu’à l’Atlantique. A l’écart d’un Monde africain LSA, cette industrie demeurait MSA et exprimait même une grande stabilité depuis le MIS 5a. Ces gens pourraient avoir porté les haplogroupes A1a et surtout A1b ? Grâce au climat légèrement humide de l’Hengelo, des *Atériens d’Afrique du Nord pourraient avoir eu la possibilité de repeupler une partie du Sahara, et même de s’avancer jusqu’aux bassins du Niger et du lac Tchad ? Toutefois, si des vestiges de populations atériennes sont bien attestés dans ces régions aujourd’hui désertiques, leur mouvement colonisateur est très mal daté, et rien ne permet d’affirmer qu’il faut le situer à l’époque d’Hengelo, si ce n’est l’embellie climatique.

 

Peuples africains d’haplogroupe DE* et E

 

Les populations *Rétro-africaines d’Afrique de l’Est possédaient une industrie LSA ancienne. Si l’on accepte les dates de divergence calculées par des méthodes génétiques, elles comprenaient déjà des haplogroupes très différenciés que l’on peut essayer de localiser :

- L’haplogroupe DE*(non-E), situé au cœur du massif éthiopien et à sa périphérie Ouest, était peut-être déjà devenu résiduel ? E1a devait aussi être situé à l’Ouest du massif éthiopien étant donné sa répartition ultérieure ? C’est même peut-être lors de l’Hengelo, que ces tribus E1a et certaines tribus DE* commencèrent à descendre dans l’Est de la bande sahélienne, à la faveur de son reverdissement ? La séparation entre E1a1 (E-M44) et E1a2 (E-Z958) date peut-être de cette époque, v. 37.000 AEC ? Le premier de ces variants est aujourd’hui représenté à la fois en Afrique subsaharienne centrale et au Proche-Orient, tandis que le second est exclusivement subsaharien et plutôt en position occidentale. L’avancée des tribus E1a se fit nécessairement au détriment des populations indigènes d’haplogroupe B. Pour l’heure, les ancêtres des E1a1 proche-orientaux devaient encore stationner au Soudan ?

- Descendu du massif éthiopien, l’haplogroupe E1b1a1 (E-M2) prit peut-être la place du groupe E1a, à l’Ouest du plateau ? Ce mouvement préparait E1b1a1 à une future colonisation de la zone sahélienne où ces migrants allaient devenir les ancêtres patrilinéaires d’une grande partie des Africains Africoïdes d’aujourd’hui. Ce morphotype pouvant avoir été acquis au contact des indigènes d’Afrique de l’Ouest ?

- L’haplogroupe E1b1a2 (E-M329) demeurait localisé en Ethiopie en compagnie d’E1b1b (E-M215). C’est peut-être à cette époque, v. 37.000 AEC, que cet haplogroupe donna naissance à un variant mineur E1b1b2 (E-V16) qui allait jusqu’à nos jours rester confiné en Ethiopie et au Yémen, ainsi qu’à un variant majeur E1b1b1 (E-M35) dont le destin allait être à la fois africain, proche-oriental et européen [cf. cartes R & suivantes], mais dont les formes racines E1b1b1* (E-M35*) sont toujours présentes dans le massif éthiopien contemporain.

- Enfin, l’haplogroupe E2 pourrait avoir été localisé au Sud Soudan et/ou en Ouganda ?

 

 

EURASIE

 

L’Hengelo fut la période où les Hommes modernes d’Eurasie occupèrent presque tout le grand continent septentrional, ne laissant plus subsister de Néandertaliens et de Dénisoviens de ‘’pures souches’’ que dans les marges les plus hostiles (latitude et altitude), en prélude à leur disparition qui suivra bientôt. Cette disparition se fera par dilution du génome des derniers Hommes archaïques de pure souche dans le génome des Hommes modernes, selon un gradient où la proportion de gènes archaïques restera dans un premier temps élevée dans les marges hostiles, avant de baisser progressivement sous l’effet conjugué de métissages croissants et de la pression de sélection. Cela en attendant le grand brassage populationnel du LGM qui homogénéisera les proportions de gènes anciens et modernes [cf. carte R & S].

 

Peuples asiatiques d’haplogroupe DE* et D

 

Au cours de l’interpléniglaciaire, la poussée de nouveaux groupes humains accentua la marginalisation des peuplades *Paléo-Asiatiques d’haplogroupe DE* / D dont les ancêtres avaient été les premiers Humains modernes d’Extrême-Orient.

 

Nécessairement, les *Proto-Aïnous D1b s’étaient précédemment installés en Chine du Nord Orientale, en Corée et en Mandchourie où cet haplogroupe est toujours faiblement représenté. Peut-être faut-il leur attribuer le site de Zoukoudian Tianyuan, où un homme moderne présentant des traits archaïques a été découvert ? Au cours de l’Hengelo, possiblement confrontés à la double pression des peuples C1a1 qui remontaient en en Chine littorale, et surtout des peuples C2a qui apportaient le Paléolithique supérieur depuis la Mongolie, des groupes D1b atteignirent les îles méridionales de l’archipel japonais et les îles Ryükyü291 où ils semblent avoir été les premiers Humains292. Le site d’Ishinomoto atteste leur présence v. 38.000 AEC. Le détroit de Tsushima – qui sépare le Japon de la Corée – n’était pas exondé à l’époque d’Hengelo et ne le fut d’ailleurs jamais au cours de la dernière glaciation puisque sa profondeur atteint – 140 mètres. Peut-être faut-il alors repousser la première conquête du Japon à l’époque du stade d’Huneborg, v. 37.000 AEC, lorsque le détroit était moins large qu’aujourd’hui et assez facile à franchir grâce aux îles agrandies qui le parsemaient293. Ce mouvement des premiers Aïnous doit être considéré comme celui d’un vieux peuple encore mal outillé (outils sur éclats de type Paléolithique moyen ‘’autrement’’, FLK) qui survécut dans le refuge d’un conservatoire insulaire tandis que ses frères du continent étaient progressivement remplacés par un peuple intrusif de ‘’mode 4’’, c’est-à-dire bien mieux outillé qu’eux294. Pourtant, ces gens de culture fruste seront un jour à l’origine de la brillante culture Jomon295 [cf. carte U].

 

En Chine de l’Ouest et du Nord-Ouest, nous avons associés les porteurs de l’haplogroupe D1a à un groupe *Paléo-Tibétain. Confrontés à la pression des peuples C2c de ‘’mode 4’’, et profitant du beau climat de l’Hengelo, ceux-ci commencèrent à peupler v. 40.000 AEC la dépression de Qaidam et la région des lacs du Qinghai, c’est-à-dire les franges Nord du massif tibétain. C’est à cette époque que nous ferons disparaitre hypothétiquement les derniers Néandertaloïdes orientaux296 du Qinghai, où plutôt que nous les fondrons définitivement dans la population de leurs colons modernes D1a297 ; il a d’ailleurs été montré que l’aptitude des tibétains à la vie en altitude est un legs des Humains archaïques de la région, que ceux-ci aient été des Dénisoviens locaux ou des populations Néandertaloïdes antérieurement métissées avec des Dénisoviens qui les avaient précédés [cf. atlas n°2]. Dans le même temps, au Sud-Est de la Chine, les reliefs appelés ‘’collines du Sud’’ abritaient peut-être toujours des tribus D1a ? Enfin, au Sud du massif tibétain, demeurait encore des populations DE*, que les envahisseurs plus récents avaient laissé subsister dans le refuge des basses montagnes.

- Parmi les autres peuples *Paléo-Asiatiques, les Andamanais (haplogroupes DE* et D*) et les *Paléo-Philippins (haplogroupes DE* et D2) conservaient leur technologie ancestrale qu’ils allaient encore garder jusqu’à l’Holocène.

- Enfin, il restait peut-être des peuples D sur Bornéo ? Le site oldowayen supérieur de Niah  pourrait-il leur être attribué ? Vers 40.000 à 37.000 AEC on y a découvert un jeune Humain moderne mais présentant des traits archaïques. Typique d’un métissage.

 

A l’Hengelo, la remontée des eaux fragmenta en trois sous-groupes géographiques les *Paléo-Australiens du Sahul (haplogroupes DE* ?) : néo-guinéen, australien et tasmanien. Contrairement au Sunda, dont il faut cependant rappeler que les côtes anciennes nous sont inaccessibles, on décèle une évolution technologique dans cette région du Monde : s’il ne s’est pas agi du passage à un franc Paléolithique supérieur de ‘’mode 4’’ comme cela fut le cas dans l’essentiel de l’Eurasie, il existe des vestiges qui attestent désormais l’existence d’une pensée moderne. Ainsi, en Australie, c’est à partir de l’Hengelo que l’on trouve des sépultures intentionnelles (Willendra / Mungo) et une utilisation de pigments (ocre) sur des parois d’abris et probablement comme base de peintures corporelles ; cette matière colorante présentait assurément une grande importance pour les *Paléo-Australiens puisqu’il arrive que les gisements d’ocre soient distants de plusieurs centaines de kilomètres des sites où l’ocre fut utilisé (250 km des lacs Mungo). Dans le même temps, on constate également l’existence de parures qui prennent la forme de dents perforées, ceci à la fois au Sahul et en Nouvelle-Irlande (site de Bang-Merebak). L’ensemble de ces vestiges confirme l’accès à une pensée de type moderne. Curieusement, ce comportement n’est toutefois pas attesté en Nouvelle Guinée Papouasie ; peut-être par lacune de la documentation ? Mais, jusqu’à preuve du contraire, aucun peuple du Sahul de cette époque ne produisit de lames de pierre allongées : sur ce plan, ils continuèrent à se contenter de galets cassés (OLD+) et de gros éclats débités à partir de nucléus simples (FLK), parfois avec une taille bifaciale. Au total, cette étrange industrie *Quasi Paléolithique Supérieur (QPS) – qui cumulait des composantes modernes tout en conservant les plus vieux modes lithiques de Clark – est descriptivement qualifiée de ‘’mode 1-2-3-(4)’’ sur les cartes. Cependant, ces industries du Sahul sont parfois appelées Core Tool and Scraper Tradition (CTS). Ce *Quasi Paléolithique Supérieur très particulier du Sahul met, par contraste, en lumière la grande homogénéité du ‘’véritable’’ Paléolithique Supérieur d’Eurasie. Homogénéité qui se comprends aisément lorsqu’on déroule, comme nous le faisons, la phylogénie des haplogroupes ADN-Y et celle – parfaitement parallèle à ces hautes époques – des langues qu’ils devaient véhiculer.

Pourquoi constate-t-on cette évolution technologique séparée et encore pour longtemps incomplète en direction de la modernité ? Peut-être parce qu’à distance éloignée du stock génétique dénisovien (qui n’exista jamais au Sahul), les habitants du Sahul connaissait une intense pression de sélection en faveur des variants génétiques ‘’normo-cognitifs’’ ; pression de sélection qui n’avait plus la possibilité d’être négativement contrebalancée par une réinjection permanente de gènes archaïques ? En revanche, plus loin au Nord, si jamais une vieille population Dénisovienne de ‘’pure souche’’ – où même déjà seulement Quasi-Dénisovienne298 – persistait encore dans l’intérieur des terres de l’Indo-Sunda, la poursuite de métissages sur une période plus prolongée pourrait avoir établi un contrepoids durable à cette pression de sélection ; expliquant peut-être l’absence prolongée d’un comportement moderne sur la péninsule (ou en tout cas sur les vestiges actuellement émergés de la péninsule qui sont les seuls accessibles aux archéologues) ?

 

Peuples d’haplogroupe C

 

Déjà extrêmement fragmentés, les peuples d’haplogroupe C de l’Hengelo ne peuvent plus être appréhendés que de manière géographique. Rappelons que ces peuples C – nécessairement originaires du ‘’hub’’ moyen-oriental lorsqu’on examine la répartition actuelle des variants de l’haplogroupe C – sont assez bien associés à la macro-famille linguistique Déné-Caucasienne, à l’exception de ceux qui se sont installés dans la région très particulière d’Asie du Sud-Est où il apparait que TOUS les groupes ethnolinguistiques qui s’y sont succédés avant le Néolithique, ont subi d’importants remaniements de leurs langues (langues entrechoquées et donc multi-créolisées). Nous le constaterons bientôt également pour les peuples d’haplogroupe O et pour les peuples d’haplogroupe MS dont les cultures et les langues s’écarteront à leur tour de celles de leurs ancêtres patrilinéaires K2 dont l’haplogroupe est par ailleurs associés aux langues eurasiatiques.

 

Peuples d’haplogroupe C du Sunda

 

Nous avons précédemment supposé qu’une poussée des populations d’haplogroupe F2 et F4 en Indochine aurait être en relation avec le déplacement des peuples *Proto-Australiens C1b1 et C1b2 en direction du Sunda299 et des Célèbes. Au prix d’une interprétation de données pauvres et mal datées – Bornéo, Sulawesi et les Philippines semblent avoir connus une industrie lithique sur gros éclats (FLK) qui se superposa à l’industrie sur galets cassés des périodes antérieures (OLD+). Ces nouvelles populations pourraient même avoir été plus modernes que cela et avoir mérité le qualificatif de *quasi paléolithiques supérieures (QPS) ? Aux alentours de 40.000 AEC, plutôt que les outils (FLK), c’est l’apparition d’un comportement pictural moderne qui autorise à se poser la question sur la côte orientale de Bornéo (site de Lubang Jeriji Salèh) et à Sulawesi (site de Maros).

 

En revanche, le cœur de l’Indochine, Sumatra, Java et les petites îles de la Sonde restèrent fidèles au vieil *Oldowayen supérieur (OLD+), au moins jusque v. 30.000 AEC. S’agit-il d’artéfacts de mesure ? Ou cela peut-il être mis en relation avec d’hypothétiques groupes Dénisoviens (ou désormais Quasi-Dénisoviens) qui auraient survécu tardivement dans les forêts d’Indochine, de Sumatra et de Java ? Si cela fut le cas, les contacts avec ces Humains archaïques (ou quasi-archaïques) auraient pu contrebalancer l’action de la pression de sélection qui tirait partout ailleurs les Hommes modernes d’Eurasie en direction d’un esprit de type moderne ?

Outre Sumatra et Java où leur présence n’est qu’hypothétique mais où il a bien fallu qu’elles passent, les populations C* – que nous avons appelées *Déné-Caucasiennes-Paléo-Méridionales – étaient peut-être déjà installées dans les petites îles de la Sonde et à Ceylan où elles s’étaient réfugiées et où leurs descendants existent toujours. Nous cesserons dès à présent de parler d’elles.

 

Peuples d’haplogroupe C de Chine du Sud

 

Nous ne savons pas par quelle route sont passés les ancêtres *Paléo-Ryükyüens des individus C1a1 qui vivent aujourd’hui sur les îles Ryükyü, mais nous avons choisi de les faire passer par la ’’voie du Sud’’. Dans cette logique, ils pourraient avoir peuplé le littoral chinois à l’époque d’Hengelo, région où ils firent peut-être pression sur les peuples indigènes D1b, contribuant à l’installation de ceux-ci dans l’archipel du Japon ? Si le site de Longquan (Chine du Sud) peut leur être attribué, ces *Paléo-Ryükyüens exprimaient des pensées modernes ainsi qu’on peut l’inférer de l’existence d’outils en os, dont une alène polie. Cependant, l’industrie lithique demeurait archaïque, réalisant au total un faciès culturel particulier que nous pourrions appeler *Quasi Paléolithique Supérieur (QPS) ; faciès comparable à celui que nous avons rencontré en Australie et en Nouvelle-Irlande de la même époque, sans qu’il soit besoin d’invoquer un lien étiologique. C’est pourquoi la même explication peut être tentée dans cette région de Chine de Sud : celle d’une population littorale qui n’avait plus la possibilité de se métisser avec des Dénisoviens de ‘’pure souche’’ et au sein de laquelle s’exerçait désormais sans contrepartie une pression de sélection qui poussait dans le sens d’une restauration des cognitions modernes ? Sur le plan linguistique, le séjour des C1a1 en Asie du Sud-Est pourrait avoir eu pour conséquence une profonde modification de leur langue originellement Déné-Caucasienne ? Cela est inaccessible à l’étude.

 

Peuples d’haplogroupe C d’Asie Centrale et d’Europe Orientale

 

Confronté à l’expansion septentrionale des peuples K2a, le groupe initialement centre-asiatique que nous avons appelé *Déné-Caucasien-Septentrional avait été fragmenté en deux sous-groupes Est et Ouest ; dont les hommes véhiculaient les haplogroupes C1b* et C1b1 – [cf. carte L].

- A l’Hengelo, le sous-groupe de l’Est – porteur de l’haplogroupe C1b1 – constituait un peuple *Proto-burusho que nous pouvons essayer de localiser dans les basses vallées du Pamir, des Tien-Shan et de l’Hindu-Kush. Certaines de leurs tribus pourraient avoir profité du climat plus humide pour peupler également les piedmonts du bassin du Tarim et la Dzoungarie ? Ce mouvement additionnel n’est pas attesté mais il permettrait d’expliquer pourquoi des variants de C1b1 se retrouvent aujourd’hui disséminés chez des peuples Turcs et Mongols, depuis le Kirghizistan, dans l’Altaï et jusque chez les Toungouses et les Koryaks de la côte du Pacifique Nord. Tout ceci est nécessairement le produit dilacéré d’une ancienne expansion depuis longtemps absorbée par d’autres peuples300.

- Le sous-groupe Ouest – porteur des haplogroupes C* / C1b* / C1b1* – pourrait avoir passé le stade d’Hasselo sur les rives orientales de la mer Caspienne et/ou dans les steppes de l’Oural [cf. carte M]. A l’Hengelo, il s’étendit en Ukraine et en Russie Orientale à la faveur de l’embellie climatique. Commodément, nous nommerons *Kostenkien ce peuple dont l’industrie était du type Paléolithique Supérieur Initial (PSI). Plus précisément, sa culture est désormais appelée Kostenki-Streletskaya ancien ou Kostenki-Spitzine (v. 41.000 à 36.000 AEC)301 en suivant la nouvelle chronologie du PSI d’Europe Orientale. Elle comprenait des outils moustériens typiques accompagnés d’outils plus modernes, comme on le voit dans les ‘’cultures de transition’’ d’Europe Occidentale et Centrale. On a également fait remarquer des similitudes avec l’Aurignacien qui pourraient avoir été la marque d’un héritage culturel commun à tous les peuples C1 originels, plutôt que celle d’un apport précoce de l’Aurignacien occidental dans les plaines orientales ? Outre les outils lithiques, la culture matérielle était pleinement moderne, et comprenait notamment des parures (dents perforées). Qui étaient les porteurs de cette culture ? A Kostenki-14, l’archéogénétique vient  d’identifier un individu d’haplogroupe C1b* / C1b1* qui exprimait un fort héritage Néandertalien tout en étant majoritairement un Humain moderne. Ce métissage n’a pas lieu d’étonner car il est probable que d’authentiques Néandertaliens de ‘’pure souche’’ existaient toujours dans la région, au moins au Nord de la Kama ? Ainsi, 10.000 ans plus tard environ, les restes humains plus septentrionaux qui seront découverts à Sungir exprimeront toujours des traits Néandertaliens [cf. carte P].

 

La découverte d’individus C1b* dans les plaines russo-ukrainiennes est importante parce qu’elle est à verser aux pièces qui accréditent la réalité de la famille linguistique préhistorique que des chercheurs audacieux ont depuis longtemps identifiée et baptisée Déné-Caucasienne. Nous les suivons pleinement parce que cette famille s’impose à l’évidence ! Voyons de nouveau pourquoi : Les vestiges de la nappe linguistique Déné-Caucasienne sont aujourd’hui divisés en un groupe Déné-Caucasien-Oriental (comprenant les langues Sino-Tibéto-Birmanes, Ienisseïennes et Na-Dénés, à base C2), et un groupe Déné-Caucasien-Occidental (comprenant les langues Burusho, Basque / Euskarienne et Nord-Caucasienne) que nous découvrons basé sur C1. Actuellement, le Burusho est encore partiellement porté par individus C1b1 que nous pensons être les descendants patrilinéaires de la population fondatrice de ce peuple.

Notes :

(286) Elle commence à s’exonder à – 50 mètres.Retour

(287) Ces gens étaient initialement les frères des ancêtres majoritaires des actuels Pygmées. Mais contrairement à ces derniers, ils étaient restés dans la zone sahélienne et ne s’étaient pas aventurés dans la grande forêt pluviale. L’haplogroupe B est rare en Afrique du Nord, quoique non absent ; dans cette région, on ne sait pas si la présence de B est le vestige de temps anciens au cours desquels B aurait percolé au travers d’un épisode de Sahara vert ? Ou s’il s’agit d’une conséquence récente de la traite esclavagiste.Retour

(288) Faute d’une autre possibilité, ils auraient ‘’choisi’’ pour refuge la forêt, là où d’autres peuples vaincus ‘’choisissent’’ plus souvent les îles ou les montagnes. Il est probable que seules les tribus limitrophes de la forêt – c’est-à-dire celles qui avaient de longue date apprivoisé l’orée des bois – disposaient des ressources technologiques pour pénétrer plus avant sous les frondaisons et s’éloigner de la pression colonisatrice que subissaient leurs frères des prairies.Retour

(289) Séparés en plusieurs branches dont B2b1a2b a été datée de v. 35.000 AEC. Cette date ancienne d’un variant déjà bien ramifié, légitime de placer les grandes bifurcations en amont.Retour

(290) Ce n’est plus le cas aujourd’hui, ces langues ayant été remplacées par des langues du groupe nigéro-kordofanien (haplogroupe E majoritaire). C’est seulement entre v. 3000 et 1000 AEC que les Pygmées commenceront à subir une importante pression de la part de ces voisins en expansion ; lesquels, outre leur langue, leur lègueront, par métissage, un taux important d’individus d’haplogroupe E [cf. atlas n°4].Retour

(291) Ces premiers habitants des îles Ryükyü devaient être D1b. Les C1a1 constituèrent peut-être une vague migratoire ultérieure.Retour

(292) Des traces d’activités humaines plus anciennes avaient été annoncées. Mais il s’agissait d’une fraude destinée à accréditer la thèse nationaliste d’un peuplement très ancien au Japon.Retour

(293) Le détroit de Tartarie étant très peu profond (parfois moins de – 15 mètres), l’île de Sakhaline fut rattachée au continent pendant la plus grande partie de la dernière glaciation, y compris pendant des interstades aussi chaud que celui d’Hengelo ! Plus loin, entre Sakhaline et Hokkaido, le détroit de la Pérouse est un peu plus profond (– 60 mètres) mais ne devait pas être bien difficile à franchir en périodes de basses eaux. Retour

(294) La notion de refuge apparait en post hoc pour les observateurs du passé. Initialement, des populations indigènes en infériorité numérique et / ou technologique se réfugient là où elles peuvent, lorsqu’elles sont confrontées à la pression d’étrangers plus forts ; ensuite, elles ne survivent que dans les endroits que les étrangers ont négligé pour eux même. Plus tard, les montagnes et les îles apparaissent comme des refuges, parce que le vieux peuple ne survit plus que là.Retour

(295) Aujourd’hui, SM l’Empereur du Japon porte ce vénérable haplogroupe.D1b arrivé dans son pays avec les premiers Hommes, il y a 40.000 ans.Retour

(296) C’est-à-dire métissés avec des Dénisoviens septentrionaux au cours de l’Eémien.Retour

(297) Pendant un temps, il a pu exister une stratification de peuples : avec des C2c de ‘’mode 4’’ dans la plaine, des D1a de ‘’mode 3’’ dans les piedmonts, et des Néandertaloïdes dans les hauteurs. On se reposera la question d’une telle stratification dans les Pyrénées [cf. carte S].Retour

(298) C’est-à-dire déjà métissée mais dans le génome de laquelle le stock génétique Dénisovien demeurait très important.Retour

(299) A l’Hengelo, Bornéo était redevenue une île.Retour

(300) Les éléments les plus orientaux ont probablement été entrainés dans leur position actuelle à une date ultérieure, dans le sillage des peuples Eurasiatiques Indo-Européens et/ou Turco-Mongols.Retour

(301) Culture également appelée Markina-Gora, en référence à la couche inférieure (IVb) du site de Kostenki-14 Markina-Gora. Le site de Kostenki-17 Spitzine date aussi d’avant l’éruption des champs Phlégréens.Retour

Retour 288
Retour 286
Retour 290
Retour 291
Retour 294
Retour 295
Retour 296
Retour 297
Retour 298
Retour 300
Retour 301
Retour 292
Retour 293
Retour 289
Retour 287
Ancre 286
Ancre 287
Ancre 288
Ancre 289
Ancre 290
Ancre 291
Ancre 292
Ancre 293
Ancre 294
Ancre 295
Ancre 296
Ancre 297
Ancre 298
Ancre 299
Ancre 300
Ancre 301
Retour 299

© 2019 Thierry d'Amato

bottom of page