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W - 300.000 à 243.000 AEC

Complexe Glaciaire SAALIEN / RISS – SAALIEN ancien = = RISS-2 dans les Alpes

MIS 8

 

 

Quoi ! Chez tant d'animaux, muets pour ainsi dire,
on voit les sentiments dans un cri se traduire ;
et l'Homme n'aurait pu, l'Homme fait pour parler,
user de sons divers et les articuler ?

 

Faut-il nous étonner, que doué d'une voix,
L'Homme ait aux sons divers marqué divers emplois ?

 

L'impérieux besoin créa les noms des choses.
L’Homme varia les sons et nuança l'accent.
Il dut suivre la loi qui guide aussi l'enfant
lorsque du doigt il montre l'objet qui se présente,
suppléant par le geste à sa parole absente.

Lucrèce – La Nature des choses – livre V

 

 

Climat

Bien que proche de nous dans le temps, la chronologie du Complexe glaciaire SAALIEN n’est pas encore parfaitement consensuelle. On sait cependant que l’inlandsis du MIS 8 fut comparable à celui du dernier pléniglaciaire (MIS 2) ; et que cette époque coïncida logiquement avec un climat aride qui entraina l’extension des déserts.

 

Afrique

Le MIS 8 pourrait avoir été l’époque où ‘’émergea’’ Homo sapiens sapiens, – l’Homme Moderne – dans le vénérable foyer d’Afrique de l’Est ; région dont nous avons vu qu’elle avait jusque-là été le lieu de toutes les innovations anthropologiques et cognitives / industrielles survenues depuis les débuts de l’Humanité96.

La mutation moderne ‘’normo-cognitive’’.

Que s’est-il passé à l’origine des Hommes Modernes ? Au MIS 8, ce n’est pas une nouvelle espèce humaine qui émergea dans une Afrique de l’Est dont les communautés étaient à la fois démographiquement réduites et en même temps géographiquement fragmentées par la sècheresse résultant d’un épisode glaciaire intense. Pas plus que l’apparition d’une plume orange, à l’endroit où tous les autres oiseaux de la même espèce arborent une plume jaune, l’apparition d’une nouvelle particularité cognitive n’impliquait l’émergence d’une nouvelle espèce ! L’évènement qui redoubla notre qualificatif de ‘’sapiens’’ fut ‘’simplement’’ une mutation modeste sur le plan génétique mais considérable sur le plan fonctionnel en ceci qu’elle modifia profondément les capacités cognitives des individus chez qui elle était survenue ; brisant une fois de plus le ‘’plafond de verre’’ où s’étaient heurtées les facultés psychiques de leurs ancêtres. Sans chercher à identifier plus avant l’intimité génétique de cette mutation, nous l’appellerons simplement mutation ‘’normo-cognitive’’ parce qu’elle conféra à ses porteurs des capacités cognitives que nous considérons aujourd’hui comme ‘’normales’’ chez les adultes modernes de notre espèce [cf. introduction de l’atlas n°3]. Concrètement, la mutation ‘’normo-cognitive’’ améliora très significativement les facultés de décryptage du Monde, en donnant accès à une pensée abstraite qui allait être à l’origine du langage, de la spiritualité et de ce que nous appelons ‘’art’’97. Cependant, disposer de cognitions améliorées ne suffisait pas pour faire des Sapiens sapiens une espèce différente de celle des autres Humains contemporains. Ils étaient simplement des Humains – et parmi ceux-ci des Sapiens – plus doués que les autres, parce que la Nature avait par hasard entrouvert la porte de la prison cognitive où avaient vécu leurs ancêtres et depuis le fond de laquelle ceux-ci n’avaient perçu qu’une partie seulement de ce qui leur devenait désormais accessible. En définitive, ces ‘’Sapiens améliorés’’ venaient d’acquérir des outils cognitifs suffisamment performants pour pouvoir enfin innover véritablement et ainsi  créer d’authentiques cultures pour la première fois dans la longue histoire de leur lignée ; mais ils avaient encore tout à inventer sur la base de leur vieux mode d’expression vocal et de leur vieille technologie levalloisienne / MSA ancienne qui était la marque de fabrique de tout le groupe Sapiens depuis des centaines de milliers d’années !

Les proches cousins Rhodesiensis récents ‘’pauci-cognitifs’’.

Avant même d’avoir eu le temps de construire un Monde de nouvelles technologies, de nouvelles communications et de diversité culturelle, l’intelligence plus aiguisée de ce nouveau groupe humain lui donna d’emblée un avantage direct sur ses proches voisins. Favorisée par ce blanc-seing de la Nature, la communauté moderne commença alors à se répandre autour d’elle, dans cette région d’Afrique de l’Est dont elle était originaire. Evidemment, les premiers voisins que les Hommes Modernes rencontrèrent furent leurs proches cousins Sapiens archaïques africains que nous regroupons collectivement sous la dénomination pratique d’Homo sapiens rhodesiensis ‘’récents’’, parce que nous refusons le foisonnement d’une kyrielle de dénominations pseudo-spécifiques98. Par comparaison avec les facultés intellectuelles ‘’normo-cognitives’’ des Hommes Modernes, tous les Hommes non-porteurs de la mutation seront qualifiés de ‘’pauci-cognitifs’’. L’holotype d’Homo rhodesiensis (site de Kabwe) date de cette époque ; nous pensons qu’il est tardif, c’est-à-dire très largement postérieur à l’émergence du stade Sapiens.

 

L’évolution technologique découlant de la mutation.

Les Sapiens Rhodesiensis ‘’pauci-cognitifs’’ – ancêtres de l’Homme Moderne –  maniaient une industrie MSA ancienne (MSA ANC) / ‘’mode 3’’ indifférenciée, c’est-à-dire une industrie levalloisienne associée à une persistance des bifaces hérités de l’Acheuléen. Ce contexte technologique traditionnel étant rappelé, l’apparition de l’Homme Moderne en Afrique de l’Est pourrait-elle avoir imprimé une nouvelle marque repérable dans les industries lithiques, à l’instar de ce que nous avons déjà pu montrer pas à pas dans le sillage de chaque grand progrès cognitif ? Oui, probablement. Ainsi, c’est vers cette époque que le MSA récent (MSA REC) fit son apparition en Afrique de l’Est, sous la forme d’une nouvelle industrie appelée Sangoen (MSA SAN), que nous attribuons aux premiers Hommes Modernes. Parmi son éventail d’outils, le Sangoen ne comprenait plus de bifaces ; mais, surtout, il comprenait – pour la première fois dans l’histoire du Monde – quelques rares mais authentiques éclats laminaires qui seront plus tard le marqueur typologique emblématique du Paléolithique supérieur ancien / ‘’mode 4’’ [cf. atlas n°3]. En raison de cette innovation remarquable, nous identifions le Sangoen comme un ‘’mode 3-(4)’’99 sur les cartes ; ce qui le distingue du vieux Levalloisien indifférencié de ‘’mode 3’’. Cependant, en l’absence d’autres marqueurs ‘’modernes’’ connus – comme le seraient des outils en os et/ou des témoignages ‘’artistiques’’ (ocres, parures) – le Sangoen émergeant nous apparait encore globalement peu distinct du Levalloisien indifférencie / MSA Ancien ; ce qui ne nous permet pas de définir consensuellement le lieu et l’époque précis de son origine100.

Impact des premiers métissages sur les industries.

S’il ne s’agit pas seulement d’une lacune de nos observations, la rareté des marqueurs ‘’modernes’’ dans le Sangoen émergeant pourrait signifier que – malgré des cognitions devenues modernes – il fallut du temps aux premiers Hommes Modernes pour innover à partir de la base ancestrale ? Mais il faut aussi se demander quelles furent les conséquences cognitives du métissage des tout premiers Hommes ‘’normo-cognitifs’’ avec leurs proches voisins et cousins Rhodesiensis ‘’récents’’ qui étaient demeurés ‘’pauci-cognitifs’’ et qui maniaient donc toujours un Levalloisien MSA ancien traditionnel ? Peut-être fallut-il ‘’un certain temps’’ pour que la pression de sélection élimine les gènes ‘’pauci-cognitifs’’ au sein des tribus métissées ; et donc un ‘’certain temps’’ pour que, dans ces tribus périphériques de la région nucléaire où était apparue la mutation ‘’normo-cognitive’’, les facultés cognitives modernes ré-émergent de nouveau au-dessus du ‘’seuil de la pensée abstraite’’. Le processus ‘’en feu de prairie’’ de la diffusion africaine puis mondiale de la mutation ‘’normo-cognitive’’ sera exposé en détail dans l’introduction de l’atlas n°3101. Retenons simplement ici la thèse principale de l’atlas n°3 selon laquelle l’Humanité Moderne s’est étendue au travers d’une série de métissages survenus de proche en proche avec les Hommes archaïques.

Les marqueurs génétiques ADN-Y – L’Adam-Y.

Quoi qu’il en soit, le début de l’Humanité Moderne ne se laisse pas appréhender uniquement par l’apparition discrète des premiers outils Sangoens laminaires annonçant le futur Paléolithique supérieur. C’est à partir de cette époque que l’on peut commencer à utiliser la génétique pour essayer de circonscrire les groupes humains et pister leurs migrations à l’aide des haplogroupes ADN-Y. La nature et la signification de ces haplogroupes ADN-Y seront détaillées dans l’introduction de l’atlas n°3 parce que leur analyse constitue –  parallèlement à celle de la linguistique historique – la matière principale de la reconstitution historique des mouvements humains qui seront le sujet des atlas n°3 et n°4. Contentons-nous de dire ici que les haplogroupes ADN-Y sont des marqueurs génétiques exprimés exclusivement par les hommes (sujets masculins) ; et que leur mode de transmission de père en fils permet maintenant de dessiner une phylogénie exacte et consensuelle de l’humanité en lignée patrilinéaire. Or, bien que l’étude des ossements anciens ne nous ait pas encore livré d’ADN-Y datant du complexe rissien, il est vraisemblable que les premiers Humains modernes exprimaient l’haplogroupe ADN-Y A00. Cela pour trois raisons : parce que cet haplogroupe est le plus ancien que nous connaissons ; parce qu’il est placé à la racine de l’arbre généalogique patrilinéaire de l’Humanité actuelle toute entière ; et parce que les horloges moléculaires nous enseignent qu’il pourrait bien être apparu au MIS 8 voire au MIS 9102 [cf. atlas n°3]. Permettons-nous une remarque additionnelle : si toute la variété des ADN-Y de nos contemporains converge vers un ‘’plus récent ancêtre commun’’ qui vivait il y a 300.000 ans environ et qu’on appelle familièrement ‘’Adam-Y’’, c’est parce que la descendance de cet homme (masculin) fut favorisée par l’héritage de la mutation ‘’normo-cognitive’’ ; à l’inverse, les hommes (masculins) qui ne possédaient pas cette mutation eurent nécessairement un handicap reproductif car nous constatons que leur lignée patrilinéaire est aujourd’hui éteinte103. A partir de la présente carte W, les haplogroupes ADN-Y des Humains modernes figureront sur toutes les cartes du reste de l’atlas n°2 et de l’atlas n°3.

Le plus ancien langage moderne, doublement articulé.

La mutation ‘’normo-cognitive’’ donnant accès aux abstractions, c’est probablement seulement à partir de l’époque du MIS 8 que les Hommes devenus Modernes commencèrent à élaborer un langage doublement articulé sur la base de liens arbitraires qu’ils établirent entre des signifiants et des signifiés (Saussure). Ce nouvel outil de communication dut se constituer progressivement, ainsi que l’imaginait Lucrèce il y a déjà 21 siècles. Dans l’atlas n°3, la phylogénie linguistique sera abondamment sollicitée aux côtés de la phylogénie ADN-Y pour reconstituer les groupes humains anciens et leurs déplacements supposés ; et nous aurons l’occasion de constater que ces deux phylogénies nous racontent des histoires étroitement superposables. Lorsqu’on adopte cette approche généalogique, toutes les langues humaines actuelles semblent converger vers un ancêtre linguistique universel que nous proposons de situer en Afrique de l’Est à l’époque du complexe rissien. Des linguistes audacieux ont proposé d’appeler ‘’Proto-Sapiens’’ ce langage des origines dont ils ont cru pouvoir reconstituer une trentaine de mots104. En suivant notre hypothèse cognitive génétique, le langage tel que nous le pratiquons constitua un saut qualitatif majeur par rapport aux anciens modes d’expression des Humains archaïques. Né avec l’Homme Moderne, le langage moderne se répandit et se diversifia au gré de ses mouvements migratoires105. C’est d’ailleurs pour cela que – comme pour la génétique ADN-Y – nous pouvons reconstituer une phylogénie des langues ; et pour cela que les grandes branches de ces phylogénies sont superposables [cf. atlas n°3]. Les métis ‘’Modernes + Rhodesiensis’’ durent exprimer une gamme variée de compétences langagières ; mais ceux d’entre eux qui maniaient le mieux le langage – et qui étaient probablement en même temps les plus ‘’intelligents’’ et les plus ‘’habiles’’ – bénéficièrent d’une pression de sélection forte et répandirent leurs descendants loquaces dans toutes les régions alentours où les individus ‘’pauci-cognitifs’’ furent progressivement marginalisés ; que ceux-ci aient été des métis défavorisés par le tirage au sort génétique, ou des rhodesiensis ‘’récents’’ de ‘’pure souche’’. Il s’agit du processus de diffusion de la mutation cognitive ‘’en feu de prairie’’ que nous avons déjà mentionné plus haut. Tout le mécanisme sera de nouveau détaillé dans l’introduction de l’atlas n°3.

L’anthropologie physique du MIS 8 africain.

Après l’industrie, la génétique et le langage, il convient de discuter l’anthropologie physique. Nous avons dit que les premiers Humains modernes apparurent au sein de la population Rhodesiensis d’Afrique de l’Est. Afin de les distinguer de leurs successeurs plus récents, on donne parfois le nom d’Idaltu106 (Homo sapiens sapiens idaltu) aux Hommes Modernes anciens [cf. cartes X à Z]. Bien que plus récents de 100.000 ans environ, les crânes de Herto et les crânes d’Omo-1 et -2 (Ethiopie) appartiennent à cette population dont nous plaçons l’origine au MIS 8107. Nous leur avons déjà attribué l’émergence du MSA récent Sangoen (MSA SAN) [cf. ci-dessus] que nous proposerons d’utiliser comme marqueur de leur présence dans les cartes suivantes.

 

Au MIS 8, outre les premiers Hommes Modernes, d’autres grands groupes humains peuvent être distingués en Afrique :

- En Afrique de l’Est, les Rhodesiensis ‘’récents’’ (Homo sapiens rhodesiensis) devaient encore être majoritaires et n’étaient probablement pas distinguables physiquement de leurs frères Modernes. Ils exprimaient une industrie levalloisienne indifférenciée que nous avons appelée MSA-ancien (MSA ANC) et qui est difficile à distinguer du Sangoen lorsque, par le hasard des fouilles, on ne trouve ni bifaces ni lames.

- En Afrique du Sud, on trouvait toujours une industrie MSA ancienne appelée Fauresmithien (MSA FAU), qui était très semblable au MSA ancien d’Afrique de l’Est et au Moustérien d’Eurasie, avec sa panoplie de bifaces, hachereaux et outils levalloisiens. La calotte crânienne de Saldanha / Elandsfontein (Afrique du Sud), imprécisément datée entre 500.000 et 200.000 ans, donne probablement un aperçu des caractéristiques physiques de cette population que les paléoanthropologues ont rattaché à Heidelbergensis ou à (Sapiens) Rhodesiensis. Notons bien cette hésitation taxonomique qui découle peut-être de l’état fragmentaire des restes, mais qui pourrait aussi témoigner d’un métissage ancien entre des Heidelbergensis / Acheuléens et des Rhodesiensis / Levalloisiens dans le Finis terrae d’Afrique du Sud ? En dépit de la difficulté à déterminer des transitions nettes entre les industries africaines, le Fauresmithien pourrait avoir disparu vers la fin du MIS 8 ; date après laquelle il aurait localement été remplacé par le Sangoen (raréfaction / disparition des bifaces et apparition de quelques rares lames). Ce changement pourrait avoir signé l’apparition des premiers Hommes Modernes dans la région [cf. carte X].

- En Afrique du Nord, on trouvait une autre variante du Levalloisien MSA ancien qui a d’abord été attribuée au Moustérien tant elle était proche de cette industrie eurasienne. Pour cette raison, les populations locales ont été qualifiées de Néandertaliennes par les premiers chercheurs. Cependant, le site de Djebel Irhoud a récemment livré des restes humains datés de 300.000 AEC attribués à un Homo sapiens. A la recherche du plus vieil ancêtre présentable, les découvreurs ont avancé qu’il pouvait s’agir du premier Homme Moderne ; et les médias de conclure, selon la formule consacrée, qu’il fallait ‘’complètement réécrire l’histoire de l’humanité’’ en l’ancrant dans ce ‘’nouveau berceau’’ marocain. Pourtant, il est parfaitement inutile de déplacer une fois de plus le berceau à roulettes de l’abbé Breuil où d’invoquer une très invraisemblable origine polycentrique de l’Homme Moderne ! Dans le paysage mondial que nous nous efforçons de reconstituer pas à pas, nous comprenons plutôt ces Humains *Irhoudiens comme des Sapiens rhodesiensis arrivés en Afrique du Nord via le Sahara vert du MIS 9 pluvial [cf. carte V], puis réfugiés dans les régions maghrébines qui restèrent habitables au cours du MIS 8 désertique. Cela ne retire rien à leur qualité de Sapiens ; mais cela ne fait pas d’eux les ancêtres premiers de l’Homme Moderne dont ils étaient seulement de proches cousins migrants108. Sur les cartes, l’industrie de ces populations maghrébines aurait pu être appelée *Ihroudien malgré son absence de spécificité évidente vis-à-vis des autres formes de MSA ancien, dont le Moustérien. Nous conserverons toutefois le signe générique MSA ANC.

 

Eurasie

Au MIS 8, l’expansion des déserts et une nouvelle disparition du Nil109 isola les Rhodesiensis qui s’étaient installés au Levant au cours du MIS 9 pluvial ; ce qui interrompit probablement le flux génique avec leurs cousins africains. Ces gens étaient les ancêtres majoritaires des Néandertaliens d’Europe et des autres populations Néandertaloïdes qui allaient bientôt peupler la plus grande partie de l’Eurasie. Leur industrie levalloisienne MSA ancienne moustérienne (MSA MOU) était probablement répandue sur l’ensemble du Levant dès le MIS 9 [cf. carte V]. Elle était typologiquement très semblable aux autres variantes du MSA ancien que nous avons passé en revue en Afrique ; ce qui nous montre une fois de plus que le terme de ‘’culture’’ est impropre pour désigner de telles industries très stéréotypées que nous observons sur des surfaces bi-continentales et pendant des durées énormes. A partir de cette tête de pont proche-orientale, les *Proto-Néandertaliens se répandirent probablement en Anatolie méridionale avant de mettre un pied en Europe via le passage du Bosphore qui était encore une fois exondé en période glaciaire. Ce scénario que nous reconstituons n’est pas attesté mais doit être tenu pour probable dans la mesure où, dès l’interglaciaire suivant, les Néandertaliens / Moustériens coloniseront une grande partie de l’Europe Occidentale et Centrale [cf. carte X]. Dans leurs mains, l’industrie MSA ancienne perdurera très tardivement en Eurasie, bien longtemps après qu’elle aura disparu en Afrique [cf. atlas n°3].

 

Mais pour l’heure, le paysage anthropologique européen restait proche de celui qui prévalait au cours du glaciaire précédent. Avec :

- la bipartition ethno-technologique ancestrale de l’Europe qui était acheuléo-tayacienne (ACH TAY) / Heidelbergensis dans les refuges méridionaux d’Europe Occidentale ; et tayacienne (TAY) / Antecessor ‘’récents’’ dans ceux d’Europe Orientale

- une présence acheuléenne (ACH) / Heidelbergensis aux Indes

- et un Extrême-Orient désormais partagé entre des Dénisoviens / Heidelbergensis utilisant une forme locale de l’Acheuléen (ACH) et des ‘‘Erectus récents’‘ utilisant une technologie dont la base demeurait toujours oldowayenne (OLD +). Ces derniers semblent alors disparaitre du registre fossile en Chine du Nord, peut-être après s’être fondu dans la population Heidelbergensis ? Mais les ‘‘Erectus récents’‘ demeuraient probablement présents en Chine du Sud et dans le Sunda (sites de Ngandong et de Sambungmacan à Java) où l’Homme dit de ‘‘Solo’‘ était leur descendant méridional (Homo erectus soloensis).

- Plus loin encore, de l’autre côté de la ligne Wallace, le nanisme insulaire transformait peu à peu en Hobbits les ‘‘Erectus anciens’‘ dont les ancêtres s’étaient autrefois échoués par hasard sur l’île de Flores.

 

A l’exception des premiers Hommes Modernes qui devaient commencer à balbutier leurs premières phrases complexes, aucun des autres Humains contemporains ne possédait le langage. Cette affirmation peut paraitre arbitraire et non fondée. Elle ne l’est pas ! Car si elle était fausse, il serait impossible de justifier pourquoi tous les Hommes archaïques conservèrent des industries inchangées pendant des centaines de milliers d’années et pourquoi ils ne conçurent jamais de civilisation technologique pendant les beaux Interglaciaires qui précédèrent le nôtre.

 

A partir de cette carte W – qui acte le début de l’Humanité Moderne – les générations110 seront comptées de manière plus précise, en ajoutant les 2000 années de notre ère commune aux années AEC proposées pour les époques géologiques étudiées dans les cartes X, Y et Z. ce sera également le cas dans l’atlas n°3.

 

Notes :

(96) On notera que l’âge que nous proposons est plus ancien que les 200.000 ans habituellement avancés pour dater l’origine de l’Humanité moderne. Cela découle à la fois de l’âge estimé de l’haplogroupe ADN-Y A00 et de révisions chronologiques des sites africains Sangoens et des sites syriens hummaliens [cf. ci-dessous & carte X].Retour

(97) Il est peu probable que l’art pour l’art ait existé aux époques anciennes. Il faut plutôt comprendre l’art comme un fossile de spiritualité et d’esprit magique. Cela ne retire rien à sa beauté et à l’émotion qu’il nous procure. Au contraire même.Retour

(98) Par convention, on appellera Rhodesiensis ‘’ancien’’ ceux des Rhodesiensis qui étaient chronologiquement situés en amont de l’apparition des Hommes Modernes (porteurs de la nouvelle mutation) ; et Rhodesiensis ‘’récents’’ ceux des Rhodesiensis qui seront chronologiquement situés en aval de cette mutation et qui demeureront cognitivement semblables aux ‘’anciens’’ faute d’être porteurs de la nouvelle mutation.Retour

(99) L’annotation 3-(4) signifie que le mode 3 était prévalent sur le mode 4.Retour

(100) Et cela d’autant plus que les difficultés de l’archéologie africaine fragilisent la reconstitution de cette transition. Il faut mentionner ces difficultés bien identifiées : peu de sites sont intégralement fouillés, peu de sites ont fait l’objet d’une datation, et encore moins de sites sont correctement datés étant donné leur ancienneté qui rend inopérante la méthode du C14 ; il faut également ajouter que la stratigraphie est souvent impossible à établir en Afrique, notamment dans les régions autrefois forestières, parce que les couches de terrain ont souvent été mise sans-dessus-dessous par l’action ininterrompue des racines des arbres et des animaux fouisseurs, qui – comme des couverts à salade – ont vigoureusement brassé les sols pendant des dizaines de milliers d’années. Enfin, il est très important de mettre en lumière une autre difficulté de datation inhérente à l’archéologie africaine : sur ce continent, les changements technologiques se sont produits sans heurts, toujours sous la forme de transitions souples, rendant illusoire l’établissement de séparations bien nettes entre deux phases.Retour

(101) Il n’y a pas lieu de penser que ce phénomène combinant une mutation génétique pro-cognitive (i.e. donnant un avantage) et des métissages fut unique dans l’histoire. On peut également l’invoquer lors du processus de remplacement des Heidelbergensis acheuléens par les Sapiens archaïques levalloisiens (Rhodesiensis demeurés en Afrique et Néandertaloïdes migrés en Eurasie) et, plus anciennement encore, lors du processus de remplacement des Erectus / Antecessors oldowayens par les Heidelbergensis acheuléens, africains et Eurasiens.Retour

(102) La fourchette de dates s’étend de 340.000 à 208.000 AEC.Retour

(103) On peut reconstituer une phylogénie ADN-Y dans toutes les espèces de Mammifères. Celle des Humains contemporains converge vers un plus récent ancêtre masculin commun qui était A00 et qui vivait probablement au MIS 8. A la même époque, les Néandertaliens avaient des ADN-Y issus d’une bifurcation encore plus ancienne. De nos jours, il faut remonter à la bifurcation avec les Chimpanzés / Bonobos pour trouver le plus récent ancêtre masculin commun entre la variation des ADN-Y humains et celle d’un autre groupe vivant.Retour

(104) Leur approche et l’idée même d’une langue originelle unique ont été beaucoup critiquées par des linguistes qui étaient pourtant à peu près ignorants des autres champs de recherche que nous essayons de synthétiser en un tout cohérent.Retour

(105) De nombreux chercheurs pensent que le langage existait déjà avant l’Homme Moderne, ne serait-ce que parce que l’anatomie du cou le permettait. Mais chez les dinosaures, les plumes existaient avant le vol ! Les atlas n°2 & n°3 exposent largement les raisons qui permettent de penser que le langage est apparu tardivement.Retour

(106) Encore une fois, toutes ces terminologies peuvent donner l’impression d’un foisonnement brouillon d’espèces humaines qui auraient été différentes et juxtaposées. Mais, en réalité, ces noms ne font que décrire des chrono-formes / chrono-races au long d’une dérive graduelle. Une fois que l’on a compris cela, et pour peu qu’on n’en conserve qu’un petit nombre, ces noms deviennent utiles en tant que jalons localisés dans le temps et dans l’espace.Retour

(107) Des crânes Modernes plus anciens seront peut-être découverts un jour. Et, de nouveau, on claironnera bêtement qu’il faut ‘’réécrire l’histoire’’.Retour

(108) Il est probable que des restes d’Humains plus modernes que les *Irhoudiens et datant de la même époque qu’eux, attendent d’être découverts en Ethiopie ou dans les régions voisines. Retour

(109) Le Nil cessa de nouveau de couler vers 300.000 AEC.Retour

(110) Nous rappelons que nous retenons 4 générations de 25 ans par siècle. Retour

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© 2019 Thierry d'Amato

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