Y - 11.600 à 10.800 AEC
Tardiglaciaire
Interstade d’Alleröd : 11.600 à 10.800 AEC
MIS 2 (8/9)
Climat
Les données glaciaires issues des forages groenlandais sont difficiles à plaquer sur la périodisation traditionnelle. L’interstade d’Alleröd pourrait correspondre à un complexe d’oscillations climatiques rapides (GI-1c1 à GI-1a) qui couvrirent une période de 8 siècles entre v. 11.600 et 10.800 AEC. Il serait ainsi possible de découper la période en un ‘’Alleröd ancien’’ (GI-1c1), de 11.600 à 11.300 AEC ; un refroidissement intra-Alleröd ou IACD (GI-1b), de 11.300 à 11.200 AEC ; et un ‘’Alleröd récent’’ (GI-1a), de 11.200 à 10.800 AEC.
L’Alleröd fut l’amélioration la plus significative du Tardiglaciaire, au point de constituer une répétition générale de l’Holocène. Outre la remontée des températures, l’humidité était encore plus élevée qu’au Bölling. La toundra régressa et n’occupa plus que l’extrême Nord de l’Europe, la grande plaine se recouvrant alors de pinèdes au Sud et de forêts de bouleaux au Nord, avec un renouvellement quasi-total du gibier et des techniques de chasse. Des étendues herbeuses conséquentes subsistaient néanmoins comme l’atteste la présence du cheval. Les grands ongulés des steppes froides qui avaient été le gibier de prédilection des anciens *Magdaléniens refluèrent vers le Nord de l’Europe tandis que le mammouth et le rhinocéros s’éteignirent sur ce continent, ne subsistant plus désormais que dans les régions froides de Sibérie. Les rennes disparurent des plaines françaises et ceux d’entre eux qui ne s’étaient pas replié au Nord, remplacèrent les chamois aux basses altitudes tandis que ceux-ci commencèrent à occuper les hauteurs.
Plus encore qu’au Bölling, les gens durent s’adapter à ces gros changements qui méritent parfaitement le label de catastrophe écologique majeure.
AFRIQUE
Afrique du Nord
Situation ethnolinguistique inchangée.
Afrique Tropicale
Situation ethnolinguistique inchangée. Proposons cependant l’arrivée de E1a sur la côte atlantique de l’Afrique. Cette chronologie n’a rien d’assuré.
Afrique du Sud
Situation ethnolinguistique inchangée.
EURASIE
Asie Sud-Orientale (Inde, Indochine, Sunda, Sahul)
Situation ethnolinguistique inchangée. A cette époque, le Sunda commença à se désagréger du fait de la remontée du niveau des océans. Bornéo s’individualisa, tandis que Java et Sumatra formaient encore un ensemble unique, peut-être encore rattaché à la péninsule malaise. Nous avons fait le choix de dater du Dryas-3 le début de la colonisation de la Nouvelle-Guinée-Papouasie par des *Proto-Australiens C1b2 venus du Sunda ; ceci parce que l’épisode stadial facilitait les transports maritimes en réduisant les distances à franchir [cf. carte Z]. Cependant, le recul littoral des périodes interstadiales dût confronter les populations côtières à d’importantes tensions intertribales pour le contrôle des ressources ; raisons pour laquelle cet important mouvement migratoire aurait également pu se produire au cours de l’Alleröd où au début de l’Holocène ?
Asie Extrême-Orientale (Chine, Corée, Japon, Mandchourie, Mongolie)
Situation ethnolinguistique inchangée.
Asie Septentrionale (Asie Centrale, Sibérie Occidentale, steppes, Altaï, Baïkalie, Sibérie Orientale, Alaska, Amériques)
C’est peut-être au cours de l’Alleröd que R1b1* quitta l’Asie Centrale méridionale et s’installa à proximité de l’Emba qui, au Sud de la chaine de l’Oural, prolonge la frontière entre l’Asie et l’Europe. Depuis cette position, R1b1* pourra un jour se retrouver dans l’extrême Sud-Est de l’Europe Orientale, où une étude archéogénétique l’identifie dans la culture holocène de Samara [cf. atlas n°4].
Les steppes du Kazakhstan devaient déjà être le domaine de populations *Proto-Indo-Européennes R1b-M269* qui se trouvaient alors à un stade épipaléolithique très ancien de leur développement. C’est de cet haplogroupe R1b steppique que sortiront les grands variants de R1b qui sont aujourd’hui portés par environ 60 % des Européens de l’Ouest et dont les mouvements sont abondamment détaillés dans l’atlas n°4. La culture épipaléolithique de ces gens est parfois décrite sous le nom de Microlithisme du Kazakhstan du Nord (MIC NOR KAZ). Tandis qu’au Semiretchie (oblast d’Almaty) et sur le Haut-Irtych (Vostochnyy Kazakhstan), d’autres peuples (vieux haplogroupes N* ?, R* ? et C1b1 ?) développaient le Microlithisme du Kazakhstan du Sud (MIC SUD KAZ), aussi mal connu que son homologue septentrional.
Au Nord de la zone steppique, c’est peut-être v. 11.000 AEC que l’haplogroupe R1a1a1b-Z645/S224 donna naissance à ses variants R1a1a1b2-Z93 – lui-même ancêtre de Z94, haplogroupe majeur chez les Indo-Européens orientaux de la famille Aryenne – et R1a1a1b1-Z283 – lui-même ancêtre de Z282, haplogroupe majeur chez les Indo-Européens orientaux de la famille Balto-Slave, mais aussi haplogroupe représenté chez Ouraliens d’Europe Orientale septentrionale441. Notons que les dates de divergences habituellement proposées sont plus récentes, d’âge holocène.
A l’Est, la steppe de Baraba pourrait avoir été peuplée par des porteurs de R1b-M73 dont nous faisons un *Peuple R1b steppique oriental installé là au cours du Bölling [cf. carte X]. Ce peuple constituait le pendant oriental d’un *Peuple R1b steppique occidental que nous assimilons aux *Proto-Indo-Européens et dont l’haplogroupe R1b-M269* était la forme ancestrale de R1b-L23 qui structurera jusqu’à nous l’histoire du peuple Indo-Européen. Tardivement, ces R1b-M73 s’intégreront aux mouvements orientaux des Indo-Européens et deviendront même majoritaires dans la branche altaïenne de ce peuple442 [cf. atlas n°4].
Au Nord et à l’Est de ceux-ci, vivaient probablement toujours les descendants Q1a1-F746 du vieux peuple d’Afontova Gora. Nous en avons fait un groupe *Para-Eskaléoute, proche parent des *Proto-Kitoï de Cis-Baïkalie, ainsi que des véritables *Proto-Eskaléoutes qui vivaient désormais sur les rives de la Moyenne-Lena et de l’Aldan après s’en être possiblement détachés au cours du Pré-Bölling et du Bölling [cf. cartes W & X]. Certains chercheurs pensent que le Mésolithique commença dès l’époque d’Alleröd dans ces régions très orientales ; mais c’est peut-être trop tôt et nous reporterons plutôt cette évolution au début de l’Holocène [cf. atlas n°4]. Ces peuples d’origine lointainement occidentale443 avaient abandonné le technocomplexe Yubetsu pour revenir au détachement de lamelles à partir de nuclei coniques et prismatiques ; sur les cartes, nous nommons leur culture Microlithisme Prismatique (MIC PRI) afin de ne pas anticiper le nom de la culture Sumnagin qui en constituera l’évolution mésolithique, en amont de la migration septentrionale qui sera à l’origine des peuples Esquimaux et Aléoutes [cf. atlas n°4]. Rappelons ici, qu’aux deux extrémités du système des steppes asiatiques et malgré des morphotypes physiques devenus différents, le peuple *Proto-Indo-Européens (basé sur R) et le peuple *Proto-Eskaléoute (basé sur Q, le groupe frère de R) partageaient des traits linguistiques d’origine eurasiatique ; traits qui devaient alors être beaucoup plus nombreux qu’aujourd’hui, puisque nous pouvons toujours en identifier un certain nombre 14.000 ans plus tard !
En Trans-Baïkalie, dans les bassins de la Haute- et de la Moyenne-Vitim (site d’Ust’Karenga), un Mésolithique céramique était apparu dès le Bölling chez un peuple qui maniait la technique Yubetsu parallèlement à des techniques de débitage d’origine occidentale. Il pourrait s’agir du peuple des *Proto-Tchouktcho-Nivkhes qui était basé sur l’haplogroupe P1*(non-R), plus proche de R que de Q ? Etant donnée la géographie, sa culture céramique avait certainement été adaptée de celle de Gromathuka dans la vallée du Moyen-Amour, elle-même découlant de celle d’Osipovka (OSI) sur le Bas-Amour. Nous qualifions de *Para-Na-Déné-Ienisseïennes ces populations anciennement céramistes et purement Yubetsu de Mandchourie, qui n’appartenaient vraisemblablement pas au même groupe ethnolinguistique que celles de Trans-Baïkalie ; nous avons proposé de les baser sur des variants de C2b.
En Sibérie Orientale, des peuples *Na-Déné-Ienisseïens C2b1 s’étaient installés au Nord dès le pré-Bölling, en descendant la vallée de la Basse-Lena [cf. carte W]. A l’époque de Bölling ils s’étaient répandus de part et d’autre de cette région [cf. carte X] :
- Du côté de l’Ouest (Yakoutie Occidentale), certains avaient contourné le Plateau Central Sibérien par le Nord et s’étaient installés v. 12.000 AEC dans la basse vallée de l’Ienisseï ; vallée qu’ils avaient peut-être remontée en direction du Sud lors de la péjoration climatique du Dryas-2 survenue v. 11.700 AEC ? [cf. carte X]. Leur méthode Yubetsu, basée sur des nuclei en forme de coins, contrastait avec celle des peuples du Haut-Ienisseï (probablement Q1a1) devenus leurs voisins méridionaux, mais qui, eux, détachaient leurs lamelles à partir de nuclei coniques et prismatiques. A défaut d’être leurs ancêtres patrilinéaires, ces *Proto-Ienisseïens étaient les ancêtres linguistiques des peuples Ienisseïens444.
- Du côté de l’Est (Yakoutie Orientale), d’autres *Na-Déné-Ienisseïens de la Basse-Lena avaient contourné par le Nord l’ensemble formé par les monts de Verskhoïansk et les monts Chersky, et s’étaient avancés en Yakoutie Orientale du Nord. Dans ces régions, ces groupes Yubetsu entrèrent en interaction avec des groupes indigènes, lointainement parents des Amérindes de Clovis, dont la culture Nenana puisait – comme la culture Clovis contemporaine – ses racines dans les industries anciennes de type PSM (débitage de lamelles à partir de nuclei coniques et prismatiques) [cf. carte X]. A l’Alleröd, le peuple *Proto-Na-Déné atteignit le Tchoukotka où il mêla ses traditions Yubetsu avec les traditions Nenana des indigènes *Para-Amérindes auxquels nous avons attribué plus haut les haplogroupes Q1b1-M3 et Q1b1-Z780. Au début du Dryas-3, ces interactions engendreront la culture Denali qui sera mixte mais dans laquelle la base Yubetsu prédominera445. La future culture Denali sera probablement celle des groupes *Proto-Na-Déné les plus orientaux (Tchoukotka et Alaska), dont l’un migrera plus tard sur la côte pacifique du Canada et deviendra ce faisant l’ancêtre des peuples Tlingits, Eyaks et Athapascans au début de l’Holocène [cf. carte Z & atlas n°4]. Mais pour l’heure, au cours de l’Alleröd, les deux cultures – intrusive et indigène – coexistaient encore en Alaska ; situation qui explique la double mention YUB NEN sur la carte Y.
- Comme au Tchoukotka, le Microlithisme Yubetsu (YUB) apparut au Kamchatka au cours de l’Alleröd. La datation désormais stabilisée du site d’Ushki-1 atteste cette première colonisation certaine de la région. S’agissait-il de groupes *Proto-Na-Dénés descendus depuis le Tchoukotka où ils s’étaient récemment installés ? Ou de groupes lointainement cousins, issus de bandes *Para-Na-Déné-Ienisseïennes qui seraient venues du littoral Sud de la mer d’Okhotsk parce que le réchauffement très significatif de l’Alleröd les autorisaient à s’installer plus loin vers le Nord ? Dans les deux cas, ces gens exprimaient probablement l’haplogroupe C2b1.
Enfin, en Amérique du Nord, au débouché du corridor de Mackenzie qui était en voie d’élargissement rapide parce que l’inlandsis était en train de fondre, le peuple *Amérinde Pré-Clovis Q1b1-M3 et Q1b1-Z780 avait développé la culture de Clovis qui est caractéristique de l’époque d’Alleröd. Comme sa cousine la culture Nenana – qui était en voie de régression en Alaska et dans son prolongement asiatique (Béringie, Tchoukotka) –, celle de Clovis était une culture non-Yubetsu de type PSM. De manière très homogène, elle s’étendait depuis les franges de l’inlandsis jusqu’au Mexique dans l’axe Nord / Sud, et d’un océan à l’autre dans l’axe Est / Ouest. Notons que l’existence d’une culture homogène sur une superficie aussi vaste peut rarement être observée. Elle était à l’évidence le produit d’une expansion rapide d’une population initiale qui s’était retrouvée dans l’incroyable situation de découvrir un immense continent vide. Il en résulta un effilochage majeur de la langue béringienne des pionniers ; rapidement séparée en plusieurs variants, tous continuèrent à s’écarter rapidement de leur origine eurasiatique.
Plus loin encore, d’intrépides aventuriers franchirent à cette même époque l’isthme de Panama et furent les premiers Humains qui pénétrèrent en Amérique du Sud ; effilochant encore et toujours leur rameau méridional de l’ensemble Amérinde, dans cette immensité où ils ne rencontraient personne.
Asie Occidentale (Moyen-Orient, Proche-Orient, Anatolie, Arabie)
Dans les monts du Zagros et dans ses piedmonts irakiens que l’humidité rendait plus habitables, le Zarzien évolua en Epi-Zarzien (ZAR), une culture déjà pleinement mésolithique de chasseurs cueilleurs à large spectre qui vivaient en villages sédentaire aux maisons rondes enterrées. L’arc et les flèches étaient connus. Au Sud, l’haplogroupe L et l’haplogroupe T1 pourraient avoir été prédominants et avoir été portés par un peuple *Nostratique-3-Central / *Proto-Elamo-Dravidien, tandis que l’haplogroupe G l’était au Nord de la chaine montagneuse et pourrait avoir constitué l’haplogroupe majoritaire d’un peuple *Nostratique-3-Septentrional ? C’est à l’époque de l’Alleröd que nous proposons de placer l’expansion des peuples G1 : selon un vieux schéma tri-directionnel déjà maintes fois éprouvé, G1a migra en direction de l’Ouest (Anatolie Orientale), en direction du Nord (Asie Centrale méridionale et rivages orientaux de la mer Caspienne) et en direction l’Est sur le plateau iranien où il prit la place de R1b. Le variant G1b se retrouva quant à lui en Irak du Sud où on le trouve encore aujourd’hui. Laissé pour l’instant en arrière de cette expansion, le variant G2a demeurait peut-être encore au Nord-Zagros d’où il suivrait bientôt les traces de G1a, principalement du côté de l’Occident. Plus tard, G2a sera l’un des haplogroupes phares de l’Anatolie et de l’Europe néolithiques [cf. atlas n°4].
Au Nord de ces mouvements occidentaux, le Trialétien (TRI) était la culture du Sud-Caucase, peut-être portée par J1 et I* ? Il s’agissait d’une culture proche du Zarzien qui devait faire le pont avec les cultures Epi-Paléolithiques (EPI PAL) d’Anatolie. Les Hautes et Moyennes vallées du Tigre et de l’Euphrate étaient peut-être peuplés par des *Nostratiques-3-Occidentaux dans lesquels nous voyons un groupe *Afraso-Kartvélien encore relativement indivis [cf. atlas n°4], peuplés par des tribus d’haplogroupe J1 et J2 dont la culture faisait le pont avec le Natoufien du Levant et de Syrie.
Europe Centrale et Occidentale
Tous les peuples de l’Europe Occidentale et du Nord de l’Europe Centrale descendaient des vieux *Magdaléniens dont le groupe ethnolinguistique avait cristallisé au sortir du LGM [cf. carte T]. Leur base haplogroupale était constituée de variants de l’haplogroupe I :
- En Angleterre et jusqu’en Ecosse, le technocomplexe à pointes à cran évolua en technocomplexe à lames à dos convexe qui caractérise le stade du Creswellien récent (CRE REC). Ce peuple de l’Alleröd descendait probablement des premiers *Magdaléniens qui avaient colonisé le Nord de l’Europe au cours du Pré-Bölling [cf. carte W] et s’étaient mêlés aux ultimes vestiges des populations antérieures qui avaient survécu aux limites de la zone habitable pendant le LGM. Les *Magdaléniens *Creswelliens avaient résisté sur place aux deux épisodes froids du Dryas-1b et du Dryas-2 [cf. cartes W & X] ; et furent peut-être enrichis par de nouvelles influences venues du Sud au cours de l’Alleröd ?
- Sur le Doggerland, ces populations *Creswelliennes devaient voisiner avec celles du technocomplexe à pointes pédonculées – d’origine *Magdalénienne comme elles – qui venaient de cristalliser en conséquence de nouveaux apports méridionaux venus agir sur le substrat de groupes Federmesser qui avaient résisté au Dryas-2 dans la plaine d’Europe du Nord. Au sein de ce technocomplexe, le Bromme / Lyngbien (LYN) était la culture de la zone de toundra périglaciaire (Doggerland, Danemark, Suède du Sud, côte balte jusqu’en Courlande) ; tandis que l’Ahrensbourgien (AHR) était celle de la partie occidentale de la grande plaine du Nord de l’Europe, désormais recouverte d’une taïga (Nord de la France, Benelux, Allemagne du Centre). En rapport avec ces différences écologiques, le Lyngbien était plus pauvre que l’Ahrensbourgien. Entre l’Oder et la Vistule, le groupe de Tarnova faisait la transition entre l’Ahrensbourgien et le Swidérien de Pologne [cf. ci-dessous].
- Plus au Sud, l’Allemagne du Sud et la Tchéquie conservaient une industrie Epi-Magdalénienne (EPI MAG) demeurée plus traditionnelle. Elle était distincte de l’Azilien, mais n’échappait quand même pas complètement au phénomène d’azilianisation qui touchait une grande partie de l’Europe, peut-être en relation avec une adaptation aux nouvelles conditions écologiques forestières ?
- En France, en Suisse et sur la péninsule ibérique, c’est-à-dire dans les régions recouvertes d’une forêt mixte et tempérée, l’Azilien (AZI) – au sens classique du terme – se développait et parvenait à sa plénitude.
En Europe Centrale méridionale, balkanique et danubienne, l’Epigravettien récent (EPI REC) se poursuivait. Cette culture produisait des peintures géométriques non figuratives (site de Domica en Europe Centrale). En Italie du Nord (Bouvérien) mais également dans une moindre mesure plus loin vers l’Est, l’outillage prenait ses distances avec un Epigravettien ‘’classique’’ parce qu’il subissait un processus d’azilianisation ; justifiant le terme d’Aziloïde (AZÏ) sur la carte. Il s’agissait probablement d’une adaptation aux nouvelles conditions écologiques.
Au cours de l’Alleröd, les côtes méditerranéennes de l’Espagne et de la France furent atteintes par ce courant épigravettien aziloïde. La culture matérielle de ces régions se mit alors à ressembler au Bouvérien de Provence Orientale et d’Italie du Nord, qui en était probablement la source. Comme toujours, on peut se demander si ce phénomène résulta de simples influences qui diffusèrent de proche en proche où bien plutôt de mouvements humains plus concrets ? A ce sujet, il faut remarquer que l’haplogroupe ‘’vieux-R1’’ R1b-L754* – nécessairement venu d’Orient et par ailleurs attesté archéogénétiquement dans l’espace italo-balkanique – sera présent dans la région au Dryas-3, aux côtés de l’haplogroupe indigène I2 (site des Iboussières) [cf. carte Z]. Ceci ne peut s’expliquer que par un mouvement humain.
Europe Orientale
En Pologne et en Biélorussie, le Swidérien (SWI) et le Desnanien (DES) appartenaient au technocomplexe à pointe pédonculé, d’origine globalement occidentale, mais qui comprenait aussi des éléments culturels venus de la plaine russe. C’est probablement au cours de l’Alleröd que ces cultures mixtes se sont formées, mais elles se développeront surtout pendant le Dryas-3 [cf. carte Z]. Sur la carte Y, elles sont délimitées par une couleur verte qui connote cette possible mixité en combinant la couleur bleue des *Magdaléniens et la couleur jaune du *Peuple R1a du Nord. Les populations qui portaient ces cultures résultaient peut-être de la rencontre d’un courant occidental d’haplogroupe I, venu interférer avec un substrat local d’haplogroupe R1a qui s’était installé au Bölling ? [cf. carte X]. Les Swidériens furent les premiers habitants de l’Estonie, peut-être seulement dans la seconde partie de l’Alleröd ? Plus tard, au début de l’Holocène, les porteurs de la culture de Kunda (Baltique Orientale) seront leurs descendants directs ; à cette époque, entre v. 8000 et 7000 AEC, l’haplogroupe R1a1-M459* (i.e. variant non précisé) sera observé en Carélie (site de Yuzhny' Oleni' ostrov), mais R1b1a1a*-P297* le sera également en Lettonie (site de Zvejnieki) en conséquence manifeste de mouvements antérieurs à ceux des Indo-Européens ; lesquels apporteront en Europe le variant steppique R1b-L23 de R1b-M269*446 [cf. atlas n°4].
Certains chercheurs pensent que des groupes swidériens s’étendirent encore plus loin vers l’Est, jusqu’à la chaine de l’Oural. Mais ce possible Swidérien très oriental était-il autre chose que la culture PSR de ceux que nous appelons *Peuple R1a du Nord et que nous plaçons dans les bassins de la Haute-Volga et de la Kama ? En effet, nous avons déjà exposé que le véritable Swidérien de Pologne comprenait une composante orientale, et celle-ci pourrait avoir été de même origine que celle de ces cultures mal connues de la grande forêt russe ? Sur la Haute-Volga, cette culture sera suivie par celle de Butovo qui en descendra au début de l’Holocène. De même, les groupes du bassin de la Kama seront à l’origine de la culture de la Kama [cf. atlas n°4]. Toutes ces cultures mésolithiques appartiendront au Technocomplexe Nord-Oriental (TNO) dont nous anticipons ici l’existence, en faisant figurer son antécédent épipaléolithique sur les cartes (TNO). A l’époque d’Alleröd, les hommes de ces régions devaient porter divers variants ‘’vieux-R1a et ‘’vieux-R1b’’ ; et devaient s’être mêlés aux anciens peuples *Gravettiens porteurs de l’haplogroupe I447. Notons que les deux grands ‘’variants indo-européens‘’ de R1a – R1a-Z282 et R1a-Z94 – n’étaient peut-être pas encore présents en Europe Orientale ? Ce point devra être précisé. Mais en attendant, sans certitude, c’est au cours du Dryas-3 que nous ferons pénétrer R1a-Z283 (forme ancestrale de Z282) en Europe Orientale [cf. carte Z] ; et au début de l’Holocène que nous laisserons R1a-Z93 (forme ancestrale de Z94) le rejoindre [cf. atlas n°4]. Pour l’heure, nous situons ces variants dans les steppes de l’Irtych, de l’Ishim et du Tobol où nous proposons la séparation de Z283 et de Z93 aux alentours de 11.000 AEC. A noter que les dates de coalescence généralement proposées pour ces deux haplogroupes majeurs tombent plutôt dans la première moitié de l’Holocène, mais que cela pourrait résulter d’une distorsion ? Au-delà de cette question de dates, il est certain que ces deux formes de R1a constitueront un substrat pour les Indo-Européens orientaux, puis après cela, un substrat pour les Ouraliens occidentaux [cf. atlas n°4].
Sur la côte pontique également, c’est peut-être parce que des groupes R1a – ou d’autres groupes asiatiques – s’étaient installés dans la région, que des vestiges de l’actuelle Crimée évoquent aussi le Swidérien pour certains chercheurs ? Dans ces régions pontiques, l’Epigravettien pourrait avoir disparu ? Faute de mieux, pour ne pas étendre démesurément l’aire swidérienne, nous nommons la culture locale *Mésolithique des steppes (MES STE).
Très loin au Nord, la toundra était certainement faiblement peuplée par des groupes lointainement issus des anciens peuples *Kostenko-Gorodstoviens qui devaient eux aussi profiter de l’embellie climatique ? Une collection de vieux haplogroupes ‘’réfugiés’’ survivaient peut-être encore dans cette population demeurée paléolithique tandis que les régions situées plus loin au Sud exprimaient déjà une culture mésolithique ? Le coup de froid du Dryas-3 [cf. carte Z] les impactera probablement significativement. Dès le début de l’Holocène, leurs régions seront recouvertes par le technocomplexe mésolithique Nord-Oriental dont les affinités étaient swidériennes où quasi-swidérienne ainsi que cela vient d’être discuté ci-dessus [cf. atlas n°4].
Dans le Nord-Caucase devaient également se maintenir des groupes *Kostenkiens d’haplogroupe C1b* ? C’est eux que nous plaçons en position linguistique (et plus faiblement patrilinéaire) ancestrale des peuples Nord-Caucasiens actuels.
Notes :
(441) Cette répartition n’est pas un détail mais au contraire un élément fondamental de compréhension de la dynamique des peuples en Europe Orientale. C’est parce que R1a-Z282 s’est installé dans la région antérieurement aux mouvements des Indo-Européens et des Ouraliens qu’il a pu servir de substrat aux uns puis aux autres ; et ainsi s’intégrer dans la cristallisation ethnique – secondaire – du rameau oriental des premiers et du rameau occidental des seconds [cf. atlas n°4].Retour
(442) De la même façon, R1a deviendra majoritaire chez les Indo-Européens orientaux.Retour
(443) Rappelons que l’haplogroupe Q est l’haplogroupe frère de l’haplogroupe R.Retour
(444) Un remplacement haplogroupal surviendra beaucoup plus tard tandis que l’ancienne langue perdurera ; au cours d’un processus qui ressemble tout à fait à ce qui s’est passé dans les Pyrénées. Quelques éléments vont en ce sens : des ethnologues ont fait remarquer que les légendes des Kets font venir leurs ancêtres (patrilinéaires donc) du Sud, et que certains éléments de leur costume traditionnel sont eux aussi méridionaux [cf. atlas n°4]. Leur haplogroupe majoritaire (actuel) Q1b1-L330 vint probablement du Sud lui aussi, étant issu d’un peuple L330 que nous proposons de situer dans la dépression de Kobdo au Tardiglaciaire et à l’Holocène. Ces mouvements bien plus récents seront discutés dans l’atlas n°4. Plus loin au Nord, les Ienisseïens de la péninsule de Taïmyr seront quant à eux absorbés par les Ouraliens ; contrairement à leurs frères du Sud, ceux-ci perdront leur langue mais conserverons en revanche un taux significatif de porteurs de C2b1.Retour
(445) Nous avons fait le choix de circonscrire le complexe Nenana au Bölling et au Dryas-2 [cf. carte X] ; de le faire suivre par une période de coexistence avec le technocomplexe Yubetsu au cours de l’Alleröd [cf. la présente carte Y] ; et de situer le complexe Denali au Dryas-3 [cf. aussi carte Z]. Ceci n’est pas consensuel.Retour
(446) Sur les cartes V à X, les mouvements suggérés de R1b1a1a*-P297* ne le sont qu’en référence à cette seule donnée. Il faut espérer que d’autres données viendront éclairer cette histoire totalement cryptique. Dans l’atlas n°4, R1b-L23 sera associé aux mouvements des Tyrrhéniens et des Anatoliens en Europe. Cet haplogroupe existe encore au Kazakhstan.Retour
(447) Après que ces I – aux côtés des R1a – seront intégrés aux Indo-Européens orientaux, ce sont les migrations de ceux-ci vers les plaines asiatiques qui porteront l’haplogroupe I en Asie où il est faiblement représenté.Retour