H – 65.000.000 à 62.000.000 AEC
PALEOCENE Inférieur – Danien
Vers 65 MA, l’assèchement de la mer d’Obik permit des échanges faunistiques entre l’Asie et l’Europe. L’Afrique restait isolée.
HAPLORRHINI - v. 65 MA - Asie
Comme les Strepsirhiniens, les HAPLORHINIENS pourraient être apparus en Asie, v. 65 MA. Ils expriment : une incapacité29 d'achever la synthèse de la vitamine C ; un remplacement de la truffe 30 par un nez sec et par une lèvre supérieure fusionnée qui devient mobile et qui accentue les possibilités d’expressions faciales ; des molaires et prémolaires bilophodontes 31 ; des orbites fermées par des os à l’arrière ; des os frontaux fusionnés ; une accentuation du sens de la vision ; une diminution de l’olfaction … Leur cerveau est plus gros que celui des Strepsirhiniens32 de même taille. La plupart des Haplorhiniens ont un seul enfant à la fois ; malgré des périodes de gestations similaires, les nouveau-nés sont plus gros que chez les Strepsirhiniens, et restent plus longtemps dépendants de leur mère, ce qui interfère positivement avec leur cognition sociale. Enfin, le fondateur du clade Haplorhinien est devenu diurne et a perdu le tapetum lucidum 33 de ses ancêtres nocturnes. Ses descendants ANTHROPOÏDES sont toujours restés diurnes ; et c'est pourquoi nous voyons très mal la nuit. En revanche, ses descendants Omomyidés et Tarsiers sont redevenus nocturnes, mais sans pouvoir régénérer le tapetum lucidum ; pour retrouver une vision nocturne correcte, l'alternative consista à augmenter la taille de leurs yeux afin de capter davantage de lumière 34.
Tarsimorpha
Les ANTHROPOÏDES et les Tarsiformes se séparèrent v. 62 MA, en Asie. Outre des formes basales, ils regroupent les Omomyidés et les Tarsoïdes.
Tarsimorpha basaux / *Achiicebidae
Archicebus (v. 56 MA, Chine) est un Haplorhinien d'une 30aine de grammes, dont la lignée basale pourrait être apparue v. 59 MA ? Il était dépourvu de grands yeux, ce qui signifie probablement que les tous premiers Tarsiformes étaient encore diurnes. Ainsi, Tarsiers + Omomyidés seraient des *Eu-Tarsimorpha, descendants d'un taxon devenu nocturne, qui aurait divergé après Archicebus.
*Eu-Tarsimorpha
Grâce au grand optimum thermique (v. 56 MA), des (Eu)Tarsiformes basaux eurent l'opportunité d'atteindre l'Amérique du Nord. Faut-il voir dans cette migration l'origine de la séparation entre les Omomyidés (migrants), et les Tarsiers (demeurés en Asie en compagnie de nos ancêtres Anthropoïdes) ? Il se peut toutefois que les deux sous-clades se soient séparés plus tôt, v. 59 MA.
Archicebus – 56 MA – Archicebidae – Chine
Omomyidae
Apparus v. 59 MA en Asie, ils sont caractérisés par un museau court et de grandes orbites35 qui signifient qu’ils étaient nocturnes. C'étaient des frugivores / insectivores arboricoles, qui pesaient généralement moins de 500 g. Les Omomyidés sont divisés en plusieurs familles dont le contenu et les relations sont encore très disputés. La plupart de ces familles a vécu en Amérique du Nord, à partir de v. 56 MA : (i) Anaptomorphidae (Teilhardina dont les plus anciens représentants étaient peut-être asiatiques, Anaptornorphus, v. 56 à 46 MA), (ii) Waskakiidae (Loveina, Shoshonius, Washakius, v. 56 à 40 MA), (iii) Trogolemuridae (Trogolemur, v. 50 à 46 MA), (iv) Tetoniidae (Tetonius, Absarokius, v. 56 à 46 MA), (v) Omomyinae (Steinius, Omomyis, Hemiacodon, Tarka, Tarkadectes, Macrotarsius, Rooneyia, v. 56 à 34 MA, voire à 24 MA si Ekgmowechashala est un Omomyiné très tardif ?). Depuis l'Amérique du Nord, certains taxons ont colonisé l'Europe pendant l’hyperthermique de v. 56 MA : Anaptomorphidae (Teilhardina), (vi) Microchoeridae / Necrolemuridae (Melaneremia, Pseudoloris, Necrolemur, Microchoerus) ; là, ils furent isolés de leurs cousins américains v. 50 MA36 et disparurent v. 34 MA. C’est en Amérique du Nord qu’ils survécurent le plus longtemps : Ekgmowechashala (peut-être un Omomyiné très tardif), disparut v. 24 MA et eut la triste gloire d’être le dernier Primate qui vécut en Amérique du Nord, jusqu’à l’arrivée des premiers Amérindiens !
Tarsoidea
L’origine du clade est ancienne (v. 59 MA), ce qui explique les hésitations sur la position phylogénétique des Tarsiers actuels37 Les Tarsoïdes se sont séparés v. 50 MA en : (i) Tarsoidea basaux (Xanthoryhisis, v. 45 MA, Chine) ; (ii) Afrotarsidae38 apparus en Asie (Afrasia, v. 40/37 MA, Birmanie), mais dont un taxon fonda une lignée africaine qui exista entre v. 34 et 28 MA (Afrotarsius) ; (iii) Tarsidae (Tarsius), qui existent aussi depuis 50 MA en Asie, et qui ont augmenté la taille de leurs orbites jusqu’à la démesure. Ils se déplacent en bondissant et non en marchant à quatre pattes sur les branches comme les Anthropoïdes. Hormis ces particularités, ces petits Primates arboricoles d’aujourd’hui, nous donnent un précieux reflet de ce qu’étaient nos premiers ancêtres Haplorhiniens.
Teilhardina – 56 MA Tarsius – Actuel – Omomyidea – – Tarsidae –
Asie, Am. Nord, Europe Asie
Afrotarsius – 34/28 MA – Tarsidae – Afrique
Notes
(29) Cette mutation n’a pas été fatale, parce qu’un régime à base de fruits venait spontanément compenser ses effets délétères (scorbut). Retour.
(30) Beaucoup de Mammifères actuels ont toujours une truffe. Retour.
(31) C’est-à-dire que ces dents ont deux arêtes longitudinales.Retour.
(32) Primates dont le nez est une truffe fendue et mouillée, dont font partie les Adapiformes et les Lémuriformes. Retour.
(33) C’est une couche réfléchissant la lumière au fond de l’œil. Les Mammifères crétacés étant essentiellement nocturnes, ce dispositif leur permettait de voir la nuit sans nécessiter de grands yeux. La plupart des Mammifères actuels – même diurnes – ont conservé cet héritage. Eclairés, leurs yeux brillent la nuit. Retour.
(34) Il est très peu vraisemblable qu'une solution identique ait été indépendamment adoptée à deux reprises, dans deux clades extrêmement proches ; ce qui rend logique d'associer les Tarsiers et les Omomyidés dans un même clade de niveau supérieur, appelé Tarsimorpha, et dont les ANTHROPOIDEA sont le groupe frère. Retour.
(35) Moins grandes, toutefois, que celles des Tarsiers. Retour.
(36) Submersion du pont Thuléen au Lutétien. Retour.
(37) Même s’ils sont génétiquement plus proche des Omomyidés, ils ont conservé des traits primitifs que les Anthropoïdes ont également conservé, tandis que les Omomyidés développaient des traits dérivés ; une telle situation peut suffire à expliquer pourquoi les Tarsiers donnent – sur plusieurs points – l’impression de former un sous-clade avec les Anthropoïdes davantage qu’avec les Omomyidés. Retour.
(38) Il pourrait s’agir du groupe frère des Anthropoïdes basaux Eosimiidae. Retour.



